Énergie, pour qui et pour quoi?

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L’agitation sociale liée aux impacts du secteur de l’énergie est de plus en plus fréquente que ce soit au Québec, au Canada ainsi qu’en Amérique latine. Au Québec et au Canada, plusieurs mouvements et organisations se battent contre des projets comme le barrage de la romaine, l’exploitation et transportation des sables bitumineux de l’Alberta, l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste ou encore la hausse des tarifs de l’électricité. En Amérique latine, de nombreux projets sont aussi controversés comme le barrage de « Belo Monte » et l’exploitation du pré-sal au Brésil, les barrages de « El Quimbo » en Colombie, et « El Zapotillo » au Mexique, pour n’en nommer que quelques-uns qui mettent en évidence le mécontentement grandissant face au modèle énergétique.

« Des manifestations contre l’exploitation des sables bitumineux et les nombreux projets d’oléoducs ont eu lieu samedi dans des dizaines de villes à travers le pays, dans le cadre de la Journée nationale d’action pour défendre le climat. » – Radio Canada, 16 novembre 2013

« Professeurs et des affecté.e.s de Belo Monte bloquent l’autoroute transamazonienne » – MAB, 23 octobre 2013

« Des centaines de manifestants ont défilé autour de l’édifice de l’Assemblée législative du Nouveau-Brunswick, mardi, pour exprimer leur opposition au gaz de schiste. » – Radio Canada, 5 novembre 2013

« Plus de 200 personnes se réunissent, depuis 7 heures du matin, devant le siège de la « Companhia Paranaense de Energia » (Copel), une entreprise publique d’énergie, située dans le quartier de Batel, à Curitiba. Ce sont des familles affectées par les travaux de la centrale hydroélectrique de Baixo Iguaçu, actuellement en construction entre les villes de Capanema et Capitao Leonidas Marques, région sud-ouest et ouest du Paraná. » – MAB, 20 novembre 2013

Cette mondialisation des enjeux énergétiques nécessite un tissage de liens de solidarité entre les mouvements sociaux et les groupes de base qui sont affectés et travaillent sur ces questions. C’est pour ça que le CDHAL avec ce projet et à l’avenir,  vise à contribuer à créer et renforcer des liens entre diverses organisations et mouvements socio-environnementaux du Québec et d’Amérique latine. Nous voudrions être le pont entre les mouvements d’Amérique latine et ceux du Québec afin de renforcer les luttes pour un modèle énergétique juste et équitable partout dans les Amériques, et contribuer à la création de liens de solidarité internationale réciproques. Ces alliances fortifieront les mouvements québécois, et aussi ceux d’Amérique latine.

Mais pour cela, une analyse critique de notre modèle nous apparaît nécessaire afin de mieux appréhender notre situation actuelle. La compréhension du modèle énergétique est essentielle pour cerner les problèmes socio-environnementaux engendrés par celui-ci et repenser le modèle. Pour cela de nombreuses questions doivent être posées, à quoi sert l’énergie, à quels intérêts répond le système de production, de distribution, de vente et de consommation d’énergie, quel type de modèle le développement énergétique alimente-t-il, et les impacts socio-environnementaux de celui-ci?

A travers de ce projet, le CDHAL veut contribuer à la conceptualisation et création d’un modèle énergétique que permet le contrôle de nos sources d’énergie d’une manière décentralisée et démocratique pour le bien commun. Au lieu d’une économie qui exporte des matières premières, déplace les collectivités de leur territoire, crée peu d’emplois, concentre les richesses et génère des problèmes sociaux et environnementaux, ne serait-il pas plus intéressant pour les citoyen.ne.s de vivre avec un modèle énergétique qui cherche à répondre aux besoins des peuples et qui alimente une économie domestique durable et inclusive ?

Pour cela, des questions sur la justice énergétique, voire la « souveraineté énergétique » (pour le MAB), seront aussi posées, un concept qui répond à des critères sociaux et environnementaux. Il nous apparaît intéressant de l’étudier et de voir les pistes possibles pour son application au Québec et en Amérique latine.

Qu’est que c’est la justice énergétique ou la « souveraineté énergétique » (pour le MAB)?

Le concept de souveraineté énergétique est une approche de création, distribution et consommation d’énergie durable basée sur les droits et centrée sur la population. Elle est fondée sur une analyse critique au niveau social, environnemental et énergétique. Pour cela on doit poser des questions, énergie pour quoi faire ? Pour diriger notre économie et notre société dans quelle direction ? Et pour qui ? Qui paye ? Qui profite ? Est ce que les énergies vertes alimentent un modèle énergétique plus équitable ? Sont-elles une vraie solution au problème ? A-t-on vraiment « besoin » de générer toute cette énergie ?

Avec ces réponses on peut proposer un modèle de production, distribution, vente et consommation d’énergie qui favorise un développement inclusif et durable au lieu du modèle actuel qui alimente en énergie subventionnée des industries énergivores (comme par exemple l’industrie minière) qui génèrent peu d’emplois et créent beaucoup de problèmes sociaux et environnementaux. Pour mettre en pratique ce model, il est nécessaire de rapprocher le milieu rural et urbain, tout le monde est affecté par le model énergétique. Donc, on doit travailler ensemble afin que nos ressources naturelles ne soient pas privatisées et décaracterisées. Le concept de souveraineté énergétique nous permettrait de mieux gérer nos ressources et dans un contexte respectueux des droits humains et de l’environnement. Depuis les années 70 la lutte du MAB a revendiqué le besoin de créer un modèle basé sur la souveraineté énergétique.

Pour développer leur proposition sur la souveraineté énergétique, le MAB et leurs alliés s’appuient sur des principes de la souveraineté alimentaire, définis par la Via Campesina (Déclaration de Nyéléni 1996):

« La souveraineté alimentaire est le droit des peuples à une alimentation saine, dans le respect des cultures, produite à l’aide de méthodes durables et respectueuses de l’environnement, ainsi que leur droit à définir leurs propres systèmes alimentaires et agricoles. Elle place les producteurs, distributeurs et consommateurs des aliments au cœur des systèmes et politiques alimentaires en lieu et place des exigences des marchés et des transnationales. Elle défend les intérêts et l’intégration de la prochaine génération…La souveraineté alimentaire donne la priorité aux économies et aux marchés locaux et nationaux et fait primer une agriculture paysanne et familiale, une pêche artisanale traditionnelle, un élevage de pasteurs, ainsi qu’une production, distribution et consommation alimentaires basées sur la durabilité environnementale, sociale et économique… La souveraineté alimentaire implique de nouvelles relations sociales libérées de toute oppression et inégalité entre hommes et femmes, entre les peuples, les groupes raciaux, les classes sociales et les générations. »