Sous le risque constant d’être expulsées de leurs communautés, 60 000 personnes représentées par un groupe de paysans ont manifesté devant le palais présidentiel pour exiger un dialogue afin de résoudre la crise qui sévit à Petén, dans le nord du pays.
Par Juan Calles
Des membres des communautés de Laguna del Tigre et de Sierra Lacandón, dans le département de Petén, ont manifesté ce vendredi matin 26 août devant la Maison présidentielle, dans la zone 1 de la capitale, pour exiger la mise en place d’une table de dialogue afin de résoudre la crise humanitaire qui se profile près de la frontière mexicaine.
Outre un « sit-in » devant la Maison présidentielle, où se trouvent les bureaux administratifs de la Présidence de la République, ils ont lu un communiqué dans lequel ils signalent que quelques 60 000 personnes vivaient dans les communautés de Laguna del Tigre et de Sierra Lacandón avant qu’elles ne soient déclarées zones protégées. Aujourd’hui, elles se trouvent dans une situation d’insécurité, car elles sont constamment menacées d’expulsion comme leurs maisons se trouvent désormais dans une zone protégée.
« Nous dénonçons l’expulsion par l’État de six communautés, la capture de dirigeants communautaires, l’assassinat de plus de six paysans, la fusillade par l’armée de membres de la communauté de Laguna Vista Hermosa ; tout cela sous l’argument de la protection de la nature, mais les véritables intérêts sont le pétrole, le gaz naturel et la négociation de crédits carbone par le biais du projet Guate Carbon », indique leur communiqué.
De plus, ils dénoncent le fait que les routes d’accès aux communautés Nueva Jerusalén 2 et La Revancha ont été détruites à l’aide de bombes. « Nous craignons que ce ne soient pas les routes mais les communautés qui soient détruites par des bombes et qu’ils publient ensuite qu’ils ont tué des trafiquants de drogue », ont-ils déclaré lors d’une conférence de presse.
Proposition alternative pour le développement intégral et durable des communautés affectées par la déclaration des zones protégées
En 2016, les communautés affectées ont élaboré une proposition de manière démocratique et participative intitulée « Alternative pour le développement intégral et durable des communautés affectées par la déclaration des aires protégées ». Afin de faire connaître leur proposition et d’éviter tout conflit, ils ont demandé un dialogue de haut niveau, mais le Conseil national des zones protégées (CONAP) a décidé qu’il était illégal de dialoguer avec les communautés parce qu’elles vivaient dans des zones protégées.
« Ils font preuve d’un manque de volonté politique pour nous considérer comme des alliés dans la protection et le soin de la nature. Ils nous criminalisent et nous diffament comme des trafiquants de drogue. Ils tirent et assassinent des paysans. Ils nous refusent le droit de vivre en paix et en sécurité, mais en 2010, ils ont décrété une loi pour la compagnie pétrolière afin qu’elle puisse fonctionner pendant 15 années supplémentaires », ont ajouté les membres de la communauté.
Ce matin, lors de la manifestation, ils ont formulé 5 demandes concrètes :
- Que les poursuites pénales contre les membres de la communauté cessent ;
- Que des tables de dialogue soient établies entre les institutions et les communautés afin de résoudre la situation ;
- Que les attaques violentes contre les communautés arrêtent ;
- Que la loi sur les zones protégées soit réformée, car elle menace la vie, la santé et le développement intégral des communautés ;
- Qu’une vérification soit effectuée par des organisations nationales et internationales de défense des droits humains.
L’avocat Juan Castro, du cabinet d’avocats des peuples autochtones qui accompagne les communautés dans leur démarche juridique, a affirmé que 60 000 personnes risquent d’être déplacées. « Où vont-ils aller, aux États-Unis ? », demande-t-il.
« Les communautés ont présenté une proposition, mais l’État refuse de la satisfaire. Quelle est la voie à suivre pour cet État répressif et meurtrier? Il n’est pas possible que sous le thème de la protection des zones, ils déplacent des communautés, mais protègent PERENCO et d’autres multinationales qui font plus de dégâts à l’État du Guatemala ».
Le 17 août, des membres de l’armée et de la Police nationale civile (PNC) ont dynamité les routes d’accès aux communautés. Ces routes ont été construites par les communautés avec leurs propres ressources, l’État n’ayant jamais répondu à ce besoin, mais ils les ont dynamitées, arguant qu’en tant que zone protégée, il ne peut y avoir de routes d’accès. Cette action illustre la gravité de la situation à Petén.
Nouvelle publiée le 26/08/022 par Prensa comunitaria