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DÉCLARATION FINALE : ANTICOP 2024

Publié par APIIDTT, le 12 novembre 2024

«  À travers les miroirs comme reflets de nos existences de résistance, nous voyons des similitudes et des différences qui révèlent la diversité des racines culturelles dans chacune des géographies de la planète, où chaque environnement nous transforme et nous transmute collectivement.

Nos miroirs projettent des vies humaines aux identités, mémoires et histoires multiples face aux chocs historiques. Même dans les différences culturelles, notre histoire est commune lorsque la dépossession et la destruction prennent forme dans les territoires, laissant derrière elles la douleur et la souffrance humaines, ainsi que la destruction et la mort de la nature.

Ces expériences dénotent des défis partagés par les sociétés, les peuples et les communautés organisées de la planète, qui nous amènent à repenser, à partager et à nous unir par-delà les frontières, les drapeaux et les cultures. Retrouver l’avenir dans l’adversité.

Ainsi, ces regards à travers le miroir, observent, ressentent et rêvent de l’altérité de ceux qui regardent de l’autre côté du même miroir ».

Pour la défense de la terre, de l’eau, des territoires, de la justice climatique et de la vie dans les pays du Sud.

Avec la présence de personnes des 5 continents de la planète, de représentants des peuples Waorani, Yaqui, Purépecha, Zapotec, Chatino, Mixteco, Ngiwa, Chontal, Wayuu, Ikoot, Sami, K’Ana, Kanak, Maya Q’echi et Nasalas, ainsi que de régions géographiques connues telles que la Colombie, la Zambie, Aruba, Bonaire, la Papouasie occidentale, le Baloutchistan, la Bolivie, le Salvador, l’Équateur, le Zimbabwe, le Canada, le Pérou, le Bénin, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Guatemala, la Suisse, la Roumanie, l’Afrique du Sud, l’Argentine, les États-Unis, le Brésil, le Chili, la Colombie, le Mexique, le Pérou, le Pérou, le Mexique et le Vénézuéla. ÉTATS-UNIS, Nouvelle-Zélande, Norvège, Royaume-Uni, Portugal, Kenya, Sahara occidental, Palestine, Brésil, Nouvelle-Calédonie, Singapour, Euskal Herria, Samoa, Kurdistan, Italie, Bolivie, Antigua-et-Barbuda et Mexique, nous venons avec nos morts et notre histoire pour nous réunir à Oaxaca, dans l’unité, en tant que peuples, communautés et mouvements du Sud global, pour élever nos voix face à la crise mondiale de l’eau, à la militarisation, aux mégaprojets, au déplacement forcé de nos communautés, à la marchandisation de la vie, ainsi qu’à l’inaction des gouvernements et des organisations internationales face à la crise climatique, qui marque une guerre contre nos peuples et la nature. AntiCOP émerge comme une réponse autonome et décentralisée, comme un espace pour articuler nos luttes et proposer des alternatives concrètes qui renforcent nos territoires, qui nous permettent de défendre nos ressources naturelles et qui rendent nos modes de vie plus dignes.

Nous voulons dénoncer le danger du retour de Donald Trump à la présidence des États-Unis comme un symptôme grave de la crise civilisationnelle et une menace pour la justice climatique et les droits humains, en particulier pour les personnes racisées. Si nous savons que les deux partis en lice suivent des logiques de dépossession, de discrimination et de génocide, leurs politiques spécifiques, fondées sur le nationalisme, le racisme et l’hostilité envers les migrants, renforcent la violence structurelle aux frontières et perpétuent un système mondial d’inégalité. Cela fait partie de la montée globale de l’extrême droite, qui conduit à un ordre international d’exclusion, de xénophobie et de néocolonialisme extractiviste, dans lequel les peuples du Sud et les migrants sont sacrifiés au profit de la croissance économique et de l’expansion territoriale.

La criminalisation des migrants, des journalistes, des défenseurs des droits humains et la militarisation des territoires limitent l’autodétermination des peuples du Sud. Dans ce contexte, la migration devient un acte de résistance aux politiques extractivistes et aux crises climatiques. Les frontières, plus que des murs physiques, deviennent des barrières invisibles qui limitent les droits humains et l’accès à la dignité.

Les mégaprojets, promus par des dirigeants et des hommes d’affaires d’extrême droite et même « progressistes », reconfigurent les territoires au nom du progrès et du développement, générant des conditions de vie insoutenables dans les communautés affectées par l’extraction et la surexploitation des ressources naturelles. Ces initiatives aggravent les effets de la crise climatique et déplacent les populations aux frontières de pays qui nient leur droit à la mobilité. Dans le même temps, elles intensifient la dépossession territoriale et perpétuent l’exploitation des peuples du Sud, en utilisant les frontières comme outils de contrôle pour protéger les intérêts des élites mondiales.

Les gouvernements, les entreprises et les groupes criminels continuent de perpétrer une guerre profonde contre les peuples et la nature pour maintenir ce système hétéropatriarcal, capitaliste et colonial, qui menace de détruire la planète. Cette guerre est déguisée par des processus institutionnels et officiels qui ne résolvent pas fondamentalement les conflits structurels et ne répondent pas aux besoins territoriaux collectifs. En conséquence, nous nous dirigeons vers un monde au réchauffement climatique catastrophique, allant vers un monde de 2,6 à 3,1°C d’ici la fin du siècle, remettant en cause l’équilibre planétaire et la survie de l’humanité.

Toutes les COP sont des salauds ! La COP29 tente de cacher, derrière un écoblanchiment hypocrite, le bilan de l’écocide, du génocide et des atrocités commises par l’Azerbaïdjan contre le peuple arménien, qui ne sont pas seulement un chapitre terrible de l’histoire, mais un écho de la façon dont la guerre et l’exploitation des ressources naturelles et des personnes s’entremêlent et exacerbent la crise climatique et sociale à laquelle nous sommes confrontés. L’omission du génocide du peuple palestinien lors de la COP28 à Dubaï en est un exemple.

Le système capitaliste actuel nous a conduits à un monde où la faune et la flore ont diminué de 73 % en 50 ans seulement. Il y a quelques jours, la COP16 sur la biodiversité s’est achevée à Cali, en Colombie, où, en dépit de certains résultats obtenus par les peuples indigènes, les afro-descendants et les paysans, on n’a généralement simulé qu’une préoccupation pour la Mère Nature, nos biens naturels et nos territoires qui sauvegardent 80 % de la biodiversité actuelle.

Face à cela, nous nous demandons une fois de plus : allons-nous attendre encore 30 ans que les gouvernements et les entreprises qui contrôlent les COP ne fassent rien ? Il est clair pour nous que pour sauver la vie, le peuple n’a que le peuple et la rage organisée est notre horizon. Partant de ce constat et en vue de l’imminence de la COP30 (qui se tiendra à Belém, au Brésil, en 2025), nous lançons un appel large, diversifié, non centralisé et combatif à nous réunir en Amazonie pour poursuivre le dialogue et la construction sur la base de l’horizontalité et de la diversité politique.

Ces réflexions mettent en évidence l’urgence et la nécessité d’une unité entre les peuples et les mouvements du Sud et du Nord pour faire face aux multiples crises qui affectent nos vies et nos territoires. Ainsi, après 5 jours de travail, les plus de 250 personnes qui ont participé au Rassemblement mondial pour le climat et la vie – ANTICOP 2024, souhaitent partager leurs sentiments, pensées et réflexions collectives.

Gestion communautaire de l’eau

Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, en raison de l’utilisation non durable de l’eau et de la crise climatique, le cycle hydrologique est déséquilibré, ce qui met en péril la moitié de la production alimentaire mondiale. Nous réaffirmons que l’eau est un droit fondamental, essentiel à la vie, et non une marchandise. La gestion communautaire des biens communs de l’eau, par l’intermédiaire de comités locaux indépendants de l’eau, est essentielle pour mettre en œuvre des solutions communautaires telles que la collecte des eaux de pluie ou les systèmes de filtration. Nous proposons également d’adopter des solutions durables, telles que les toilettes sèches. Nous devons protéger l’eau des intérêts extractifs des industries qui privilégient le profit au détriment du droit humain à l’eau.

Éducation interculturelle à l’environnement

L’éducation interculturelle à l’environnement sera essentielle pour sensibiliser les nouvelles générations à l’importance de défendre la nature, l’eau, la biodiversité et les systèmes de gestion de l’eau dans une perspective qui tient compte à la fois des connaissances scientifiques et des savoirs ancestraux. Nous devons donner aux jeunes les moyens de défendre leur territoire, en leur faisant prendre conscience du modèle de consommation extractif et mercantiliste qui nous a conduits à la crise actuelle. Nous proposons d’adopter des systèmes de production et de consommation responsables dans nos foyers et nos communautés.

Réseaux mondiaux de résistance, articulation et calendrier de la lutte collective

Nous appelons à la création d’un réseau mondial pour le climat et la vie « AntiCOP » : un espace numérique et physique qui relie nos luttes pour la défense de la terre, du territoire, de l’eau, de la justice climatique et des droits des communautés. Ce réseau nous permettra de partager nos expériences, nos ressources et de coordonner nos actions de manière synchronisée au niveau mondial, en amplifiant nos voix et en assurant la visibilité de nos demandes auprès des autorités internationales. En outre, nous proposons d’articuler un calendrier de lutte collective pour 2025, en profitant de dates clés telles que la Journée de la résistance indigène, afin de renforcer notre résistance et de faire valoir nos revendications.

Anti-COP régionales et mobilisation vers la COP30

Les Anti-COP régionales seront essentielles pour prendre des décisions collectives, rendre nos demandes locales visibles et relier nos luttes. Nous proposons des caravanes de protestation qui traverseront différents territoires jusqu’au lieu de la COP30. Ce faisant, nous cherchons à rendre visible la résistance de nos peuples et à exiger la justice climatique.

Espaces sûrs et protection pour les activistes et les défenseurs de la terre

L’activisme pour la défense de la terre, du territoire, de l’eau et de la nature en général est dangereux, et beaucoup de nos camarades sont confrontés à la stigmatisation, au harcèlement, à la répression, à la criminalisation et même à l’assassinat. Depuis la signature de l’Accord de Paris sur le changement climatique, plus de 1 500 défenseurs de l’environnement dans le monde ont été tués, la grande majorité d’entre eux dans des pays du Sud.  Nous exigeons des espaces sûrs pour les activistes, où ils peuvent se soigner et se protéger physiquement, émotionnellement et légalement. Nous proposons également des réseaux et des mécanismes de soutien juridique, de communication, technologique, psychologique, physique et de sécurité numérique pour les défenseurs des droits humains, de la terre et de l’environnement dans les territoires les plus vulnérables.

Catalogue et répertoire des actions efficaces

Nous proposons de créer un catalogue d’actions efficaces et de bonnes pratiques, afin de partager les expériences et les stratégies éprouvées dans la lutte pour la défense de la terre, du territoire et de l’eau. En outre, nous lancerons des publications imprimées et numériques qui reflètent nos histoires, nos luttes et nos propositions dans une perspective anticoloniale, antipatriarcale et biocentrique, remettant en question l’extractivisme culturel et rendant nos demandes visibles.

Fonds autonome pour les catastrophes climatiques

Face à l’échec des fonds officiels d’adaptation et de pertes et dommages, nous appelons à la création d’un fonds autonome et collectif pour faire face aux catastrophes climatiques qui affectent nos communautés, sans intermédiaires qui délégitiment nos efforts.

Nouvel ordre économique international

Nous proposons de développer des propositions pour reprendre l’autonomie économique, alimentaire et territoriale des peuples du Sud, en exigeant l’annulation des dettes colonialistes et le financement de toutes les institutions financières qui perpétuent l’extractivisme. Nous exigeons également la restitution des biens pillés par le Nord. Nous devons responsabiliser nos communautés en leur faisant prendre conscience que ce sont les institutions financières, les riches et les puissants du Nord qui sont redevables de nos territoires, qui ont été pillés et fragmentés pour financer leur développement.

Après ces réflexions, nous avons décidé de mettre en commun ce que nous sommes, ce que nous faisons et ce dont nous rêvons, tout ce qui a bien marché mais aussi ce qui a mal marché, les victoires et les défaites, nos besoins mais aussi nos capacités, nos outils, nos compétences et tout l’engagement que nous portons dans nos cœurs pour construire un autre monde où plusieurs mondes s’accordent, ainsi nous avons proposé de :

Consolider un réseau mondial pour le climat et la vie qui amplifie et soutient les luttes locales, communautaires et territoriales au niveau mondial.

Cartographier les projets extractivistes et identifier leurs sources de financement dans les territoires, en produisant des rapports d’impact et des études de cas locales. Cela permettra de documenter les effets des mégaprojets et de planifier des stratégies de résistance fondées sur des preuves.

Renforcer l’exercice de l’autodétermination des peuples en veillant à ce que les communautés reçoivent des informations claires et détaillées sur les projets qui les concernent, en garantissant le respect de leurs décisions et de leur leadership local, en assurant un consentement libre, préalable, éclairé et de bonne foi. Il s’agit de renforcer le droit à l’autodétermination et non de légitimer des projets imposés par l’État.

Promouvoir l’éducation sexuelle et une culture d’autosoins psycho-émotionnels par le biais d’alternatives communautaires afin de lutter contre la violence sexuelle et hétéropatriarcale, exacerbée par l’extractivisme et les mégaprojets colonialistes qui affectent principalement les femmes indigènes en défense de territoire et en particulier les femmes transgenres.

Promouvoir les organisations étudiantes avec des formations pour les jeunes et la mobilisation étudiante contre les combustibles fossiles et les industries extractivistes.

Sensibiliser l’opinion publique mondiale au fait que la crise climatique et l’écocide sont une guerre contre les peuples et la nature.

Récupérer les terres et les pratiques précoloniales afin de promouvoir des initiatives visant à revitaliser les espèces et les systèmes agricoles ancestraux.

Construire des communautés locales et internationales fortes et solidaires, avec des initiatives d’autosuffisance en dehors du marché mondial, y compris des pratiques telles que le tequio, le troc et les banques de temps.

Promouvoir la recherche et la mise en œuvre d’énergies renouvelables décentralisées et communautaires, et lutter contre la stigmatisation de l’« anti-développement ».

Compiler une base de données de bonnes pratiques et d’expériences réussies dans la lutte territoriale.

Promouvoir la gestion de l’eau en consolidant les systèmes communautaires de collecte des eaux de pluie, de purification et de réutilisation des eaux grises, ainsi que l’utilisation de toilettes sèches pour gérer correctement les déchets humains par le biais du compostage et de leur réincorporation ultérieure dans le sol pour le nourrir.

Nous sommes en train de construire un calendrier commun pour concentrer toutes les activités et actions que nous partageons et avons planifiées au cours des 2025 prochaines années, ainsi que les dates commémoratives et symboliques que nous revendiquons tout au long de l’année dans le cadre de nos agendas. Pour l’instant, nous partageons les dates et les accords :

Mobilisation mondiale délocalisée pour le climat et la vie, qui se tiendra simultanément dans différentes zones géographiques le 10 novembre 2025.

La Caravane méso-américaine pour le climat et la vie se tiendra entre le 11 octobre et le 10 novembre 2025.

Rencontre en Amazonie dans le cadre de la COP30, pour partager les progrès et les résultats des tâches, des travaux et des engagements pris à Oaxaca.

Rencontre méditerranéenne contre les guerres et les frontières en Afrique du Nord (dates à définir).

Nous rendons publique la plateforme des Miroirs du Sud Global qui sera le moyen par lequel nous suivrons le travail et les engagements numériques, nous vous invitons à vous joindre à nous pour la construire collectivement : https://mirrorssouthglobal.org/quenes-somos/

L’AntiCOP était bien plus qu’une réponse à la COP officielle, elle est devenue un espace de rencontre et d’articulation des peuples en résistance, un mouvement qui défie l’extractivisme, le colonialisme vert et les mégaprojets qui dépossèdent nos communautés de leurs ressources et de leurs terres. C’est aussi une articulation d’en bas qui se souvient, imagine et construit d’autres mondes en harmonie avec les écosystèmes, la biodiversité et la justice. A partir d’AntiCOP 2024, nous nous engageons à continuer à construire ensemble, en respectant nos différences et en reconnaissant nos luttes communes. Nous sommes le Sud global, nous sommes les gardiens de nos terres et de nos cultures. Cette lutte est la nôtre et nous la défendons avec détermination et unité.

Maintenant, nous acceptons de ne pas rester silencieux face aux injustices, à la criminalisation, aux agressions, aux menaces, aux assassinats et aux disparitions de personnes qui défendent la vie avec la vie elle-même. Notre voix est devenue une et notre parole voyagera à travers les régions des 5 continents de la planète.

Pour la vie, pour la terre, pour la justice et pour la dignité de nos peuples !

Rencontre mondiale pour le climat et la vie – ANTICOP 2024, Oaxaca de Flores Magón, Ville de la Résistance le 11 novembre 2024, hier la COP29 a commencé en Azerbaïdjan et nous sommes à un an de la COP30 au Brésil.

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