Marche lors de la COP16, Cancun, 2010. Crédit photo: Ian MacKenzie
10 décembre 2016
À l’occasion de la Journée internationale des droits humains, le 10 décembre dernier, le CDHAL et l’Union paysanne ont tenu à saluer deux initiatives majeures de la part du Conseil des droits humains des Nations Unies : la Déclaration sur les droits des paysans et paysannes et des autres personnes travaillant en zones rurales ; et le projet mené par le groupe de travail intergouvernemental dont le mandat est d’élaborer un traité international juridiquement contraignant sur les sociétés transnationales et autres entreprises et les droits humains. Ces deux initiatives s’inscrivent dans la définition large des droits humains où tous les droits (civils et politiques, et sociaux, économiques et culturels) sont indivisibles et interdépendants.
Ses longues années de solidarité avec les luttes des mouvements sociaux latino-américains ont fait savoir au CDHAL que les instruments internationaux existants ne suffisent pas à faire respecter les droits civils et politiques des communautés paysannes et autochtones. L’Union paysanne, de par son adhérence au mouvement paysan international, La Via Campesina, constate que dans plusieurs pays les efforts des paysans de faire respecter leurs droits socio-économiques sont punis par de graves violations de leurs droits civils : harcèlements, détentions, assassinats. La résistance des paysans à l’accaparement de leurs terres pour des fins d’agro-exportation, à la contamination des eaux par l’industrie extractive, ou à la privatisation des semences par le moyen des brevets des grandes sociétés semencières est trop souvent confrontée à des actes de violence de la part des forces de l’ordre de l’État et des agents de sécurité privés.
La Déclaration sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant en zones rurales a donc une double tâche : celle de réitérer les obligations des États ainsi que l’universalité des droits déjà reconnus, tels que les droits à la vie, à la liberté, à l’intégrité physique et à la sécurité de la personne ; et celle de formuler de nouveaux droits socio-économiques spécifiquement applicables aux paysans et aux autres personnes travaillant dans les zones rurales, tels que le droit à la terre et aux autres ressources naturelles, le droit aux semences et à la biodiversité, et même le droit de ne pas utiliser de produits agrochimiques.
La rédaction de la Déclaration et l’élaboration de l’éventuel traité sur les transnationales et les droits humains s’accomplissent à travers des processus de discussion et négociation parmi les pays membres du Conseil des droits humains et de consultations avec la société civile, au terme desquels les textes finaux seront soumis à l’Assemblée générale des Nations Unies. C’est grâce au travail de la société civile internationale que ces processus ont été entamés et qu’ils continuent à avancer, malgré les objections posées par certains pays du Nord.
En effet, il est regrettable que ces deux initiatives, portées par des pays du Sud particulièrement la Bolivie, aient reçu très peu d’appuis de la part des membres européens du Conseil des droits humains et que les États-Unis s’y soient même opposés. Dans un tel contexte, il serait souhaitable, voire essentiel, que le gouvernement canadien, qui a exprimé son intention de reprendre sa place au sein des instances des Nations Unies, prenne le leadership des pays du Nord en accordant son plein appui au projet de Déclaration des droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales et à l’élaboration du traité sur les sociétés transnationales et les droits humains. Devant la complémentarité évidente entre la Déclaration sur les droits des paysans et la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, le Canada se doit d’honorer ses promesses auprès de ses Premières Nations ainsi que de respecter les droits des petits et moyens fermiers canadiens tout en (dans les mots d’Olivier De Schutter ancien rapporteur des Nations Unies sur le droit à l’alimentation) s’assurant « que l’agriculture vivrière ne soit pas remplacée par l’agriculture industrielle ».
Union paysanne
Comité pour les droits humains en Amérique latine (CDHAL)