HomeNouvellesUne société minière canadienne reconnaît être responsable de la violation des droits humains au Guatemala, mais la menace aux communautés locales persiste

Une société minière canadienne reconnaît être responsable de la violation des droits humains au Guatemala, mais la menace aux communautés locales persiste

Une société minière canadienne reconnaît sa responsabilité dans les actes de violence perpétrés contre des opposants à la mine Escobal au Guatemala, mais la menace qui pèse sur les communautés persiste

Après cinq ans de bataille judiciaire devant les tribunaux de la Colombie-Britannique, au Canada, la société minière Pan American Silver, qui a acquis en février 2019 l société Tahoe Resources, a finalement dû reconnaître sa responsabilité et offrir une indemnisation juste aux victimes guatémaltèques de la violence et de la répression perpétrée par les agents de sécurité de la mine Escobal, dans le sud-est du Guatemala.

Le 30 juillet, pour la première fois, une société minière canadienne reconnaît publiquement être responsable de la violation des droits humains de personnes s’opposant à la mine Escobal au Guatemala.

Cependant, quelques jours après la décision contre Pan American Silver, le Parlement Xinka a publié la dénonciation suivante (8 août 2019) :

« Aujourd’hui, le Ministère de l’Environnement et des Ressources naturelles et le Ministère de l’Énergie et des Mines ont démontré avoir tout intérêt à bénéficier la Minera San Rafael.

(…)
Le ministre de l’Énergie et des Mines a eu aujourd’hui le cynisme d’annoncer le début de la consultation préalable, SANS LA PRÉSENCE des autorités du peuple Xinka. Le ministre a seulement convoqué à quatre personnes appartenant aux Conseils communautaires de développement urbain et rural (COCODES )*, avec la complicité du maire de San Rafael las Flores. Il faut noter, cependant, que la Cour constitutionnelle a clairement indiqué que les COCODES NE REPRÉSENTENT PAS LE PEUPLE XINKA.

Les ministères de l’Environnement et des Ressources naturelles, de l’Énergie et des Mines et la Minera San Rafael ont violé à plusieurs reprises la décision de la Cour constitutionnelle (septembre 2018) qui a imposé l’obligation de procéder à des consultations avec le peuple Xinka. Cette situation a été dénoncée devant la Cour suprême de justice, qui s’est rendue complice des violations, compte tenu son silence et refus à assumer la fonction de contrôleuse du processus ordonné par la Cour constitutionnelle.

Par conséquent, nous nous adressons aujourd’hui au ministère public pour dénoncer pénalement les deux ministres; et devant la Cour constitutionnelle, pour qu’elle ordonne l’exécution immédiate de sa décision et la responsabilisation de ceux qui l’ont ouvertement désobéi. »

Pour comprendre le contexte de la décision de la Cour au Canada

Depuis 2014, le groupe canadien Tahoe Resources est impliqué dans une bataille juridique au Canada suite aux événements survenus l’année précédente à la mine Escobal, dans le sud-est du Guatemala.

En avril 2013, des agents de sécurité de la mine d’or et d’argent, sous le commandement d’Alberto Rotondo, ont ouvert le feu sur des manifestant.e.s rassemblé.e.s sur une route à l’extérieur de la mine, reconnaît désormais Pan American Silver Corp.

« Plusieurs personnes ont été blessées », quatre d’entre elles ont engagé des poursuites civiles contre Tahoe Resources devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique, réclamant « justice pour la violation de leurs droits », selon le communiqué.

En 2014, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a rejeté la demande. Mais en 2017, les plaignants ont fait appel et ont gagné. La Cour d’appel de la Colombie-Britannique a décidé que l’affaire devait être entendue au Canada, car elle risquait de ne pas « obtenir un procès équitable contre une puissante multinationale » au Guatemala.

La Cour suprême du Canada a ensuite refusé d’entendre un dernier appel de Tahoe Resources.
« C’est une victoire importante pour nous et notre communauté », a déclaré Luis Fernando Garcia, l’un des plaignants cités dans le communiqué de presse. « Cela justifie notre droit de continuer notre résistance contre les opérations minières dans notre communauté. »

L’affaire contre Tahoe Resources a créé un précédent important au Canada, établissant que les tribunaux canadiens sont l’instance privilégiée lorsque les entreprises canadiennes commettent des violations des droits humains, en particulier lorsque le tribunal étranger (où la violation s’est produite) ne peut pas fournir justice aux demandeurs. Les avocats soulignent que la conclusion de cette affaire n’affectera pas le processus de consultation du peuple Xinka par décision judiciaire de la Cour constitutionnelle du Guatemala.

Des représentants du Parlement Xinka du Guatemala et de cinq municipalités de la région touchée par le projet ont exprimé leur soutien aux quatre hommes impliqués dans l’affaire.

Cependant, les communautés avertissent des tensions croissantes qui pourraient conduire à de nouvelles agressions contre des manifestants pacifiques.

Histoire de violence

Depuis 2010, plus de 100 personnes impliquées dans la résistance pacifique ont été persécutées. Quelques jours après la fusillade de 2013, un état de siège qui a duré un mois a été imposé dans la région et des postes militaires ont été établis pour réprimer les référendums locaux et les manifestations contre la mine. Plus de cinq personnes du mouvement de résistance ont été assassinées.

Depuis que la Cour constitutionnelle a ordonné la consultation des peuples autochtones Xinka en septembre 2018, la résistance a connu une forte augmentation des menaces, notamment des actes de provocation, de criminalisation et de diffamation de la part de groupes armés et d’individus liés au projet. Plus tôt ce mois-ci, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a accordé des mesures conservatoires à l’avocat du Parlement, M. Xinka, Quelvin Jiménez, et a souligné que la suspension de la mine Escobal et le processus de consultation avaient accru la tension et l’hostilité dans la région et même des menaces de mort contre Jiménez.

« Prendre la responsabilité des événements de 2013 est important, mais cela ne résout pas les raisons sous-jacentes pour lesquelles les gens se sont opposés à ce projet », a déclaré Ellen Moore, de l’organisation Earthworks. « Ce qui serait vraiment souhaitable, c’est que Pan American Silver respecte les demandes des communautés et arrête d’essayer de relancer un projet risqué qui n’a pas de consentement social. »

* Conseils communautaires de développement urbain et rural (COCODE)

Sources :
Mining Watch Canada

Radio Canada International

Facebook du Parlement Xinka

Video : https://www.facebook.com/parlamento.xinka.3/videos/575486989619592/

Photo : Simón Antonio (Prensa Comunitaria)