Ce dimanche (18 octobre), le président Ivan Duque a déclaré aux médias que «personne ne doit imposer d’ultimatum à ce gouvernement, […] nous avons démontré que nous pensons toujours à la réalité des citoyens». Néanmoins, le président a refusé de se réunir le 12 octobre dernier, à Cali, avec les communautés qui se mobilisent dans la Minga du sud-ouest.
Il ne s’agit pas de la première journée de manifestation sociale massive qui interpelle le gouvernement actuel. En 2018, il y a eu une importante grève nationale étudiante, en avril 2019, les communautés rurales ont également organisé une grève; il y a presqu’un an, la grève nationale du 21N contre le «paquetazo de Duque», [soit l’ensemble des réformes néolibérales de ce gouvernement], a éclaté et, en septembre de cette année, de multiples manifestations contre les violences policières ont eu lieu dans plusieurs villes du pays, au cours desquelles plus de 13 personnes ont été tuées en moins de 24 heures.
Ce sont là quelques-unes des étapes marquées par le gouvernement d’Ivan Duque face au manque de respect des communautés et des secteurs sociaux.
Le secteur de l’éducation fait le premier pas
Entre octobre et décembre 2018, des étudiant.e.s, des enseignant.e.s et des directeurs.trices d’établissements d’enseignement supérieur publics de tout le pays ont cessé leurs activités académiques et ont mené diverses mobilisations pour dénoncer le déficit historique et structurel des institutions qui a entraîné leur effondrement économique.
Ils et elles ont également dénoncé les mesures régressives en matière des droits du travail des enseignant.e.s.
Après plus de deux mois de manifestation, le secteur de l’éducation a réussi à obtenir du gouvernement national un financement de 4,5 milliards de pesos pour l’éducation publique. Cependant, un an plus tard, les étudiant.e.s affirment que le gouvernement n’a pas respecté les accords conclus.
La grève nationale du 21N
Après des mobilisations massives le matin et l’après-midi du 21 novembre de 2019, des «cazelorazos» spontanés ont eu lieu dans la soirée dans des bidonvilles de villes comme Bogota, Medellin et Cali, pour manifester leur opposition aux agressions des forces publiques contre les manifestant.e.s.
Les motivations de cette grève ont été principalement les réformes fiscales de 2018 et 2019, la violence exercée par l’Escouade mobile anti-émeute (ESMAD) notamment contre les étudiant.e.s, les paysan.ne.s et les autochtones, l’assassinat de dirigeant.e.s sociales et le non-respect de l’Accord de paix par le gouvernement d’Ivan Duque.
Le 23 novembre, soit le troisième jour de manifestation dans le cadre de la grève, Dylan Cruz, un étudiant du secondaire âgé de 18 ans, a été touché par une munition tirée par l’ESMAD à Bogota. Il est mort deux jours plus tard, ce qui a accru l’indignation dans tout le pays.
Les manifestations se sont poursuivies jusqu’à la mi-décembre.
Par la suite, le Comité national de la grève s’est réuni le 1er février 2020 et a prévu la reprise des mobilisations pour la dernière semaine de mars. Ces plans n’ont pu être mis en œuvre en raison de l’urgence sanitaire de la Covid-19; toutefois, des manifestations urbaines et rurales ont eu lieu dans différentes régions de la Colombie afin de revendiquer des allégements économiques pour les secteurs informels de l’économie, un revenu de base pour la population la plus vulnérable, des garanties de permanence dans les territoires ruraux, et le droit universel à la santé, entre autres.
Lors des manifestations ayant eu lieu pendant la pandémie, les actions des forces publiques ont été de nature répressive.
9 et 10 septembre 2020 : contre la violence policière
Dans la matinée du 9 septembre, une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux montre des agents de la police nationale agressant Javier Ordoñez, un homme de 44 ans, avec des chocs électriques et des coups dans le quartier de Villa Luz, à Bogota. Quelques heures plus tard, le décès de l’homme a été confirmé.
En réaction à cet événement, les citoyen.ne.s ont convoqué une mobilisation devant le CAI de Villa Luz; toutefois, des manifestations ont également eu lieu à Bogota et dans d’autres centres urbains comme Medellin, Cali, Cucuta, Saravena, Manizales, Neiva, Villavicencio et Fusagasuga.
La réaction de la police a été d’autant plus violente, faisant 13 morts et des dizaines de blessé.e.s cette nuit-là.
La Minga du Sud-ouest et le 21 octobre
Après plus d’une semaine de trajet, 7 000 paysan.ne.s, citadin.e.s, femmes, autochtones et personnes issues de communautés noires sont arrivé.e.s à Bogota après que le président n’ait pas répondu à l’invitation que ces communautés lui avaient faite à Cali. La Minga pour la Vie, le Territoire, la Démocratie et la Paix propose à Duque un dialogue politique présentiel autour de ces quatre axes.
Cette mobilisation massive rejoint la journée de manifestation au niveau national qui est convoquée pour ce mercredi 21 octobre.
Source et photo : Resumen latinoamericano