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Honduras: 26 ans d’impunité suite au meurtre de la défenseure de l’environnement Jeannette Kawas

Le 6 février 1995, Blanca Jeannette Kawas Fernández a été assassinée dans sa maison du Barrio El Centro, dans la ville de Tela (Atlántida) en représailles de son travail de défense des droits humains et de l’environnement après avoir dénoncé des cas d’exploitation forestière illégale et s’être opposée publiquement à divers projets économiques dans la péninsule de Punta Sal, au Honduras. 

La défenseure de l’environnement était connue pour son rôle dans la protection de plus de 400 espèces de flore et de faune dans le pays pendant les dernières années de sa vie jusqu’à son assassinat. Les activités de Jeannette Kawas et les progrès réalisés pour préserver 449 espèces végétales, la diversité de la flore et de la faune, les lagunes côtières, les affleurements rocheux, les marais, les mangroves, les côtes rocheuses, les plages de sable et la jungle située dans une bande côtière de 40 kilomètres, ont constitué des obstacles aux projets privés.

Elle a mené des actions contre le gouvernement de Carlos Roberto Reina Idiáquez (1994-1998), en raison de l’octroi de titres de propriété à des agriculteurs et des hommes d’affaires dans la zone centrale de Punta Sal, appelée plus tard Parc national Jeanette Kawas. De plus, elle a créé et présidé la Fondation pour la protection de Lancetilla, Punta Sal, Punta Izopo et Texiguat (PROLANSATE), qui, sous sa direction, a promu devant le Congrès national la création d’un parc national dans la région de Punta Sal. 

Etant donné que le système judiciaire hondurien ne s’intéressait pas à la clarification des causes de sa mort, le 13 janvier 2003, l’Équipe de réflexion, de recherche et de communication (ERIC) de la Compagnie de Jésus et le Centre pour la justice internationale (CEJIL) ont envoyé une déclaration à la Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) et ont désigné l’État du Honduras comme responsable du meurtre de Jeannette Kawas, ainsi que ceux de Carlos Escaleras et Carlos Luna, défenseurs de l’environnement. 

En 2009, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a déclaré la responsabilité internationale de l’État hondurien pour avoir violé le droit à la vie de la défenseure et manqué à son obligation d’enquêter et de poursuivre l’affaire de manière diligente. Dans son arrêt, la Haute Cour a ordonné une série de mesures obligatoires pour le Honduras, parmi lesquelles : mener les procédures pénales correspondantes et, si nécessaire, punir les responsables ; mener une campagne de sensibilisation et d’information sur l’importance du travail des défenseur.e.s de l’environnement ; ériger un monument à la mémoire de la défenseure de l’environnement ; et attribuer un label au parc national qui porte son nom. À ce jour, ces mesures n’ont pas encore été appliquées.

Dans l’un des pays les plus dangereux du monde pour les défenseurs de l’environnement, le Honduras, il est essentiel d’enquêter, de poursuivre et de punir tous les responsables de ce meurtre pour rompre avec l’impunité installée dans le pays et faire en sorte que des événements comme celui-ci ne se reproduisent pas.

En octobre 2019, la Cour interaméricaine a émis une résolution pour contrôler l’exécution de l’arrêt dans cette affaire, ordonnant à l’État d’adopter les mesures nécessaires pour se conformer aux réparations en attente dans les plus brefs délais. Ainsi, elle a exhorté l’Etat à construire le monument et à labelliser le parc national conformément aux considérations de la famille et de ses représentants, qui ont souligné la nécessité que cela se fasse dans la municipalité de Tela, dans des lieux qui donnent la plus grande visibilité et le plus grand impact à la préservation de la mémoire de Jeannette Kawas. 

Malgré tout, le jugement rendu par la Cour interaméricaine dans la présente affaire a une valeur historique, car il reconnaît pour la première fois qu' »il existe une relation indéniable entre la protection de l’environnement et la réalisation d’autres droits humains ». 

26 ans plus tard, son cas, comme celui des centaines de défenseur.e.s de l’environnement assassiné.e.s au Honduras, reste en totale impunité.

 

Source: Centro por la Justicia y el Derecho Internacional

Source photo: La Tribuna