La notion de « droits humains » pour le Comité est synonyme de dignité de la personne sans distinction sexuelle, ethnique, sociale ni religieuse. Nous interprétons donc la défense des droits humains dans un sens large incluant, par exemple:
« (S’inspirant), entre autres, de la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948), du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966), de la Déclaration universelle des droits des peuples (Alger, 1976), de la Convention 169 de l’Organisation internationale du travail relatives aux peuples indigènes et tribaux (1989), de la Déclaration universelle des droits collectifs des peuples (Barcelone, 1990), de la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus (1998), et de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (2007), nous considérons une panoplie de droits interreliés, en particulier: les droits reliés à la vie et à un environnement sain, à l’autodétermination et à une citoyenneté pleine.
Ces trois grands volets de droits comportent tous une importante dimension collective, et touchent à la fois à des droits substantiels – par exemple le droit à la vie, le droit à un environnement sain ou le droit au consentement – qu’à des droits procéduraux ayant trait à la manière dont les peuples peuvent défendre leurs droits, notamment au moyen de l’exercice de la liberté de réunion, du droit de participation ou de la liberté d’association. Notons que les droits procéduraux sont reconnus comme essentiels pour la mise en œuvre d’autres droits, comme le droit à un environnement sain[1].
(Le CDHAL), à partir d’une vision critique et populaire des droits humains, fortement inspiré par les mouvements sociaux d’Amérique latine qu’il appuie, conçoit ces derniers comme des processus institutionnels et sociaux qui permettent l’ouverture d’espaces de lutte pour la dignité humaine. L’approche ici privilégiée pour comprendre les droits humains est celle qui intègre dans sa compréhension et sa pratique la pluralité et la diversité des façons de considérer les luttes pour la dignité[2]. Les droits sont ainsi compris comme des produits culturels, résultant des luttes sociales et collectives qui créent les conditions permettant à toutes et tous de lutter de manière plurielle et culturellement diversifiée pour une vie digne d’être vécue[3].
La dignité est comprise en tant que raison d’être et finalité des droits humains et comme un processus de renforcement des personnes et des groupes sociaux dans la création des conditions qui garantissent l’accès aux biens matériels et immatériels, dont les êtres humains ont besoin pour vivre, de façon égalitaire, non hiérarchisée et plurielle. Les droits humains devraient trouver leurs fondements dans les pratiques et luttes sociales qui proposent des alternatives aux idéologies et aux relations dominantes, s’appuyant sur une conception historique et contextualisée de la réalité, loin des abstractions proposées par une vision libérale des droits.
Une approche critique conçoit les droits comme indivisibles, non hiérarchisés et interdépendants les uns des autres, qu’ils soient civils et politiques ou économiques, sociaux et culturels. Bien que la dimension juridique des droits et le système de garanties qui les codifie aient leur importance, dans une approche critique, les droits humains ne se limitent pas à ceux qui apparaissent dans des normes, traités ou des déclarations internationales – pas plus qu’ils ne se réduisent à l’interprétation qui en est faite par les mécanismes de contrôle. La reconnaissance et la légitimité des droits sont portées par les mouvements sociaux à partir des principes d’émancipation, de rupture avec les modèles de rapports de domination et de lutte pour la dignité inhérente à l’existence humaine.
(…) Les activités (industrielles et extractives) engendrent une augmentation exponentielle de situations de risques, parfois invisibles et ayant des implications majeures pour la vie même, et où l’on constate de nombreuses violations de droits dont l’impact est souvent irréversible: « [l]es dommages causés aux conditions naturelles de la vie se transforment en menaces médicales, sociales et économiques globales pour les êtres humains »[4]. Les droits des générations futures sont, en ce sens, compromis. Animé par une éthique de justice et de responsabilité envers l’avenir, un droit des générations futures, qui intègre le continuum de la vie et l’incertitude, est en émergence en droit international.
Il vise à protéger les générations futures, descendance au sein des familles, de la famille humaine, êtres à la fois de chair et de sang et figures hautement symboliques. Au niveau constitutionnel, deux principes fondateurs du droit des générations futures pourraient être consacrés : le principe de non-discrimination temporelle et celui de dignité des générations futures[5].
[1] Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement (1992). Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement. Rio de Janeiro, Brésil, 3-14 juin 1992.
[2] Herrera Flores, Joaquín (2007). La reinvención de los derechos humanos. Andalousie: Atrapasuenos.
[3] Idem
[4] Beck, Ulrich (2008). La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité. Paris: Flammarion, p. 147.
[5] Gaillard-Sebileau, Émilie (2011). Générations futures et droit privé – Vers un droit des générations futures. Centre de recherche juridique Pothier de l’Université d’Orléans. Éditeur L.G.D.J. quatrième de couverture