L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la « Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme » (FIDH), appelle l’État colombien à prendre des mesures prévenant l’atteinte à la vie des manifestants et œuvrant à la libération des quelques 20 000 paysans, autochtones et habitants, exerçant leur droit à la contestation sociale.
Par ailleurs, l’Observatoire appelle toute personne à écrire aux autorités pour leur demander de garantir le respect des droits humains et des libertés fondamentales, non seulement dans les lieux où la Minga mène son combat, mais dans tout le pays. Selon des informations du « Comité de Solidaridad con los Presos Políticos » (Comité en Solidarité avec les Prisonniers Politiques), l’ESMAD et l’armée nationale continuent d’utiliser des armes non-conventionnelles comme le gaz lacrymogène, contre les manifestants. De telles attaques ont été intentées le 2 avril 2019 dans le sentier “le Tunnel” de la municipalité de Cajibío (département du Cauca), lorsque les forces de l’ordre ont tiré sur les manifestants et ont vraisemblablement assassinées M. Ceferino Yunda Camayo, un défenseur autochtone de 20 ans. Selon les mêmes informations, le 3 avril 2019, des individus ont attaqués avec des pierres et des bâtons les installations du Consejo Regional Indígena del Cauca (Conseil Régional Autochtone du Cauca) et les bureaux de la Fundación Estrella Orográfica del Macizo Colombiano (Fondation Étoile Orographique du Massif Colombien).
Ces attaques furent suivies d’un autre meurtre le 12 avril à 10 heures du soir, lorsque le chef autochtone M. Aquileo Mecheche Baragon fut tiré hors de sa demeure et assassiné par des membres d’une structure paramilitaire. Selon les mêmes informations, d’autres attaques prenant la forme d’actes d’intimidation se sont produites contre des personnes et organisations défendant les droits humains. Des menaces de mort ont entre autres été émises à travers un pamphlet, adressé à ces dites personnes et organisations et signé par une structure paramilitaire se faisant appeler “Estado Mayor Bloque Central Del Valle” (“État-major du bloc central de la vallée”) des Autodefensas Gaitanistas de Colombia.
Le 27 mars, l’Observatoire avait déjà dénoncé la stigmatisation de la défense des droits humains et les menaces de criminalisation adressées aux participants de la Minga colombienne. En effet, la Minga fait l’objet de stigmatisations de la part de hauts responsables du service public du Ministère de la défense colombien, qui ont insinués devant des médias et des réseaux sociaux une association entre la Minga et la guérilla communiste des FARCs. L’Observatoire a de ce fait soulignée la restriction du droit à la contestation sociale par l’escadron mobile de la police nationale colombienne (ESMAD) et par l’armée colombienne, notamment à travers l’utilisation d’armes à feu et l’usage de gaz lacrymogènes contre les manifestants de la Minga.
Par ailleurs, l’Observatoire dénonce le manque d’actions prises par les autorités colombiennes vis-à-vis de l’incident du 21 mars dans la Vallée du Cauca au cours duquel 8 personnes perdirent la vie après une explosion dans un immeuble. En effet, en vue de la mobilisation de la Minga autochtone planifiée pour le 24 mars, des gardes autochtones furent désignés comme responsables de la préparation des lieux dans la municipalité de Dagua. Après avoir réalisé le travail logistique, les gardes restèrent à l’intérieur de l’une des demeures choisies et entendirent une détonation à l’intérieur de la maison. Malgré le fait que les communautés autochtones soutiennent qu’un objet a été lancé à l’intérieur de l’immeuble avant l’explosion, les autorités colombiennes tardent à lancer une enquête pour déterminer s’il s’agit effectivement d’une attaque ciblée. L’Observatoire demande donc au gouvernement colombien de mettre en marche une enquête impartiale.
Suite à ces événements récents, l’Observatoire dénonce les actions des autorités colombienne et a rappelé le fait que, selon les informations du Bureau du Médiateur national, pendant les huit mois du mandat du président Duque en Colombie, plus de 120 défenseurs ont été assassinées dont 63 dirigeants autochtones.
Antioquia s’unit à la Minga nationale pour la vie, la défense du territoire et la paix
L’Organisation autochtone du département colombien d’Antioquia, son Conseil de gouvernance et diverses délégations de sa Garde Autochtone, ont annoncé dans leur “Communiqué à l’attention de l’opinion publique nationale et internationale” qu’ils soutenaient la mobilisation nationale de la Minga contre le non-respect des accords conclus entre le gouvernement national et les communautés autochtones. L’Organisation dénonce l’Agence nationale de licences environnementales qui lègue des territoires autochtones à des compagnies d’extraction, tout comme le fait que le niveau d’inégalité augmente chaque jour dans des départements comme la Guajira, Cauca et Antioquia, et où des enfants autochtones meurent de faim. Elle accuse aussi le gouvernement d’Iván Duque de ne pas respecter les accords conclus avec les communautés autochtones et d’envoyer une équipe entraînée à tuer pour se charger des manifestations.
L’Organisation se revendique comme accompagnant les familles et les communautés dans la propagation du message suivant: « Dans l’Unité et la Résistance, Nous Sommes Tous la Minga ». Après 15 jours de lutte contre les agressions des forces publiques, au cours desquels 1 policier et 9 membres de la Garde Autochtone furent tués, l’Organisation s’annonce « fière de marcher de nouveau au côté de [ses] frères et sœurs autochtones […] pour discuter de ce dont personne ne souhaite parler: les politiques qui exterminent la vie physique et culturelle des peuples ancestraux ».
Sources : Resumen LatinoAmericano, « Antioquia de suma a la Minga nacional por la vida, la defensa del territorio y la paz »
Resumen LatinoAmericano, « Así habrían sido los asesinatos de los ocho indígenas según la Minga en Dagua, Valle del Cauca »
Organización Mundial contra la tortura, « Campaña de estigmatización de la defensa de derechos humanos y de la protesta social en el marco de la Minga del Suroccidente »
Le site de la FIDH, « Asesinato del Sr. Cerefino Yunda Camayo, y ataques a FUNDECIMA y el CRIC »
Le site dela FIDH, « Colombia: Asesinato del Sr. Aquileo Mecheche Baragón y nuevos ataques a la Minga »
Photo : Resumen Latino Americano