Le gouverneur de Chubut, dans sa lancée contre le peuple et en faveur des projets miniers à large échelle, a créé une commission sur les terres autochtones au sein de laquelle les communautés de la province n’auraient aucune participation. Il s’agit d’un assaut afin de réaliser des explorations minières et construire des barrages.
Le jeudi 8 juillet, plus de 20 communautés Mapuche Tehuelche de la province de Chubut ont intenté une action pénale devant la Cour supérieure de justice contre le décret 112/2021, signé par le gouverneur Mariano Arcioni. Ce décret permet la création de la Commission des terres autochtones et compte dans sa présidence un fonctionnaire du gouvernement d’Arcioni, le M. Romero Sayhueque (directeur provincial des affaires autochtones).
Pourquoi les communautés s’y opposent-elles ? La création de la Commission n’a pas respecté, entre autres, la Convention 169 de l’Organisation internationale du travail, qui établit le droit et l’obligation de l’État d’appliquer des mécanismes de consultation et de participation préalables avec les communautés autochtones pour toutes les questions qui les concernent. Cette convention est d’autant plus importante, car il s’agit, dans ce cas-ci, d’un organe qui doit assurer la représentation et la canalisation des affaires territoriales des communautés.
Une présentation similaire a été réalisée il y a quelques jours, par le Bureau du défenseur public au nom des communautés du plateau et de la cordillère de Chubut. Au total, ce sont plus de 35 communautés qui se sont exprimées sur le sujet. Elles dénoncent le fait que le gouvernement accorde des permis d’exploitation minière et réoriente les projets de barrages hydroélectriques dans différentes parties du territoire, et ce, sans consultation ni autorisation des communautés vivant dans ces zones.
«La loi de l’IAC (Institut Autarchique de Colonisation et de Développement Rural) établit qu’il doit y avoir une commission des terres autochtones nommée exclusivement par les communautés elles-mêmes», explique l’avocat Juan Manuel Salgado qui a intenté l’action pénale avec Sonia Ivanoff. «Le gouverneur a voulu modifier cette loi pour que la révision des adjudications soit effectuée non par les communautés, mais par un fonctionnaire qui se fait passer pour un représentant du peuple Mapuche Tehuelche», a-t-il ajouté.
« La commission des terres autochtones est régie par la loi depuis 12 ans, mais la province ne l’a jamais mise en pratique. Ce que Mariano Arcioni a fait de façon arbitraire, c’est d’émettre ce décret qui le met en application uniquement en nommant un président. Tout cela est inconstitutionnel, car il ne respecte pas les droits de consultation et de participation des communautés. Ils auraient dû consulter les communautés pour savoir si elles voulaient former (ou non) cette commission, et pour savoir comment élire ses membres», explique M. Ivanoff.
«Le procès vise à ce que le décret soit déclaré nul, car Arcioni a approuvé ce décret en sachant qu’il aurait dû le faire avec la participation des communautés, mais il a choisi de les ignorer. On vise à l’annuler car vouloir modifier une loi par décret, est apparent à la dictature, elle ne devrait pas avoir sa raison d’être. C’est pourquoi nous faisons cette demande», a conclu M. Salgado.
«Je ne sais pas s’il a déjà existé des actions collectives de cette envergure dans les communautés par le passé. Dans la Cordillère, il y a également eu une représentation avec un nombre similaire de communautés. Ce qui est important c’est la connaissance des droits énoncés dans la convention 169, des droits dont nous, peuples autochtones, disposons au niveau international», souligne Juana Antieco (Antuco), de la communauté Mapuche Tehuelche Costa del Lepa. «L’Argentine a ratifié la convention 169 dans toutes ses parties. Pour cette raison, nous avons décidé de dire non seulement au gouverneur Mariano Arcioni, mais aussi aux maires éminents et à tous ceux qui veulent attaquer nos territoires, que nous résistons, que nous sommes sur le point de la lutte, et que nous n’allons pas le permettre. L’exploitation minière ne va pas seulement affecter le plateau ; ils mènent des activités d’exploration partout», a déclaré Antieco.
Le maire de Gualjaina, Marcelo Limarieri, a annoncé qu’il allait construire un barrage sur la rivière Costa de Lepa, soit la rivière qui traverse historiquement la communauté Antieco et de nombreuses autres communautés. Il l’a annoncé sans consultation préalable ou informée, sans étude d’impact afin d’apprendre les effets que ce barrage aura sur la communauté, sans étude des conséquences immédiates et à long terme pour les communautés. Il s’agit d’un cas que la Commission des terres autochtones doit évaluer. On sait que si Sayhueque est celui qui présidera la commission, l’avenir du fleuve et de la communauté seront mis en danger. Il y a de nombreux cas, un autre exemple est le méga-projet La Helena sur la rivière Carrileufu. «Ils dupent les populations en disant que nous allons avoir de l’électricité gratuite pour tout le monde, mais la réalité est que les entreprises extractives doivent augmenter leur production et qu’elles ont besoin d’une énergie constante», explique Antieco.
Le membre de la communauté Mapuche Tehuelche Costa del Lepa affirme qu’il est temps de défendre le territoire de la province de Chubut, de défendre un espace où le peuple n’a pas permis l’installation de l’activité minière à large échelle : «Comparons avec la province de Neuquén. Ils ont énormément de puits de pétrole partout dans leur territoire et l’autre jour, une école a explosé en tuant des enseignants, mais le gouvernement s’en moque. Il poursuit ses objectifs. C’est à nous de continuer à lutter pour que cela ne se reproduise plus. Cela malgré le fait que de nombreux camarades vont continuer à être arrêtés, à être poursuivis et à faire l’objet de procès. Il s’agit d’une question historique que peuple mapuche subit. Nous devons redoubler d’efforts et continuer à lutter contre ces usuriers qui ne pensent qu’à leur poche. La crise du Chubut a été provoquée par eux pour faire en sorte que nous acceptons les intérêts qui se cachent derrière leurs poches».
Source: Revista Cítrica
Source photo: Revista Cítrica