par Mary Durran, chargée de programmes pour l’Amérique latine
Photo: Une partie des installations du nouveau barrage hydro-électrique.
Deux mois après les négociations sur le climat qui ont eu lieu à Paris, lors de la COP21, les États ont convenu de réduire de manière significative leurs émissions de gaz à effet de serre. À Bonn, en Allemagne, diverses pressions sont exercées sur les pays du G8 afin qu’ils augmentent leurs cotisations au Fonds vert pour le climat pour financer des projets d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques dans les pays du Sud particulièrement vulnérables.
À 9 000 kilomètres de là, dans la ville de Marcala, située à l’ouest du Honduras, Ana Miriam Romero a donné naissance à un petit garçon, le 2 février dernier. Sa joie de devenir mère à nouveau s’est vite estompée lorsqu’elle a appris qu’elle et son mari, Rosalio Vazquez Pineda, ne pourraient plus retourner chez eux. En effet, quatre jours plus tôt, le 29 janvier, des policiers et des paramilitaires ont mis le feu à leur petite maison au toit de paille, détruisant ainsi les quelques biens du couple. Selon le CEHPRODEC (Centre hondurien pour la promotion du développement communautaire), un partenaire de Développement et Paix, l’attaque a été menée dans le but de défendre un projet de barrage hydroélectrique controversé et financé par des fonds internationaux pour le climat.
En tant que président de MILPAH (Mouvement des indigènes Lencas de La Paz), à San Isidro, Rosalio Vazquez Pineda a mené la résistance contre le projet nommé Los Encinos, qui menace les sources d’approvisionnement en eau et en nourriture de la communauté. Le CEHPRODEC accompagne le MILPAH dans la défense des droits des Lencas, l’un des huit peuples autochtones parmi les plus pauvres du Honduras.
À Marcala, le gouvernement a confisqué 102 hectares de leurs terres pour des projets hydroélectriques, sans les consulter au préalable, alors qu’il en a l’obligation en vertu de la Convention 169 de l’Organisation internationale du travail, un traité international ratifié par le Honduras. MILPAH appuie les Lencas dans la défense de leurs terres et demande à ce qu’ils soient préalablement consultés avant la mise en œuvre de tout projet. Le mouvement populaire est actif dans une zone particulièrement violente du Honduras, où les armes circulent et les paramilitaires ainsi que des assassins payés défendent les intérêts des puissants. Les concessions hydroélectriques de cette zone ont été attribuées à l’une des femmes les plus puissantes du Honduras, Gladys Aurora Lopez, vice-président du Congrès et présidente du Parti national au pouvoir.
En 2015, vingt dirigeants Lencas ont été assassinés dans des circonstances qui demeurent non élucidées. Les menaces et les intimidations à l’encontre des Lencas sont constantes. Ainsi, Rosalio Vazquez a été faussement accusé d’avoir assassiné un autre homme autochtone, malgré le fait qu’un suspect avait déjà été condamné et purge actuellement sa peine en prison. Le leader du MILPAH a d’ailleurs un alibi solide puisque des témoins ont attesté du fait qu’il ne se trouvait pas dans le bar où l’assassinat a eu lieu.
De plus, sa femme, Ana Miriam Romero n’a pas eu une grossesse facile. À 24 semaines de grossesse, précisément le 22 octobre 2015, la maison familiale a été perquisitionnée illégalement à l’aube, par la police et les militaires. Ils ont battu les membres de la famille, y compris Ana Miriam et sa belle-sœur, qui était enceinte et a perdu son bébé. Ana Miriam a quant à elle passée une semaine à l’hôpital et son bébé a survécu.
Vendredi 12 et samedi 13 février, le CEHPRODEC organisera une caravane hondurienne de défense des droits de l’homme. Les organisations autochtones et paysannes défileront toute cette fin de semaine dans la ville de Marcala et assisteront à une messe spéciale. Elles organiseront également un événement culturel pour attirer l’attention sur le sort des Lencas et demander au gouvernement du Honduras de respecter leurs terres et tenir compte de l’appel de la Commission interaméricaine des droits de l’homme d’assurer la protection d’Ana Miriam Romero et de Rosalio Vazquez, ainsi que d’autres dirigeants menacés.
Vous pouvez manifester votre solidarité en signant la pétition internationale initiée par le CEHPRODEC et en faisant parvenir un message (en français, en anglais ou en espagnol) à Ana Miriam Romero, Rosalio Vazquez et aux autres membres de MILPAH sur Faceboook du CEHPRODEC.