Avec l’information de Contagio Radio
Si l’année 2017 n’a pas bien fini, cette année commence de la même manière. Le mois de janvier se termine avec le triste chiffre de 27 dirigeant-e-s et leaders sociaux et revendiquant des terres assassiné-e-s dans au moins 10 districts colombiens. L’année passée, 170 leaders et défenseur-e-s ont été assassiné-e-s d’après les données de l’Institut des Études pour le développement et la Paix (Indepaz) et uniquement en 2018, au moins un-e leader a été tué-e presque chaque jour.
En décembre de l’année passée, le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les droits humains en Colombie a mentionné « la déqualification, le harcèlement et la stigmatisation » des défenseur-e-s de droits humains dans ce pays de l’Amérique latine. Elle a également souligné le « travail légitime, nécessaire et fondamental pour la consolidation de la démocratie, de l’état de Droit et de la construction d’une paix durable ».
Cependant, dans les premiers jours du mois de février, deux dirigeantes sociales en Colombie ont été déjà victimes de la violence. Il s’agit de Yolanda Maturana, dirigeante écologiste assassinée le 2 février à Pueblo Rico, Risaralda, et Sandra Yaneth Lina, présidente du Conseil d’Action communale du district rural Totumito Carboneras, à Tibu, au nord du département de Santander.
La défenseure de l’environnement, Yolanda Maturana, a été assassinée à l’intérieur de sa maison. Maturana était connue dans les départements de Rosalda et Chocó pour son travail de dénonciation des mines illégales et de la contamination des sources hydriques.
L’assassinat de Sandra Yaneth a été annoncé ce mercredi, bien qu’elle ait été disparue depuis le mois de septembre de l’année passée. Son corps a été trouvé pendant la nuit dans le district de La Primavera, une zone rurale de Campo Dos.
Face à ces évènements, les organisations en défense des droits humains font encore une fois sonner l’alarme et font un appel au Gouvernement National et au médiateur afin qu’ils adoptent des mesures consistantes en matière de politique publique de prévention de meurtres des leaders sociaux du pays.
Les départements où ont été répertoriés de nombreux homicides, comme celui du Chocó, sont devenus des lieux de conflit pour les droits territoriaux, dû au développement des activités économiques comme le commerce de palme, de bois, l’exploitation minière, l’élevage, entre autres. Un des éléments qui revient constamment dans cette dispute pour la terre est l’action conjointe entre les forces de sécurité de l’État et les groupes paramilitaires.
À la fin de l’année passée, près de 25 leaders sociaux se sont déplacés à Bogota pour dénoncer la grave situation qu’ils vivent dans le Bajo Atrato, région du Chocó où il existe des plans pour assassiner des dizaines de leaders. « Les paramilitaires sont encore présents dans le territoire, ils ont installé des postes de contrôle à la sortie des Zones Humanitaires et ont même menacé les membres de l’Unité Nationale de Protection qui assurent une protection aux leaders ». Là, avec les visages couverts par des masques ils ont dénoncé les activités illégales de plusieurs entrepreneurs et les constantes menaces de la part des groupes militaires.
Ils ont aussi dénoncé que les forces armées de la Colombie « ne regardent pas vers les paramilitaires, car ils sont associés avec eux ». Avec le renforcement des structures paramilitaires, ils ont dénoncé qu’à la zone humanitaire de la Costa Azul « ils ont mis en place un paramilitaire avec le pseudonyme “cuervo”, qui est armé, il a aussi une radio de communication et il réalise des actions intimidantes. (information qui peut être intéressante : Une lumière de mémoire dans le Bajo Atrato »).
Face à ce panorama, les communautés du bassin du Curvaradó se trouvent dans une alerte constante puisque “même les gardes du corps sont menacés”. Les gardes du corps des enfants du leader assassiné Hernán Bedoya se sont fait dire, “qu’ils doivent faire attention aux enfants parce qu’ils allaient les tuer”. Cette situation se répète avec différentes familles qui ont déjà été déplacées de leurs territoires.
En 2017, 105 défenseur-e-s des droits humains ont été assassiné-e-s, incluant 73 homicides contre des leaders sociaux, 18 assassinats de membres de mouvements sociaux et politiques, et 14 victimes pendant des mobilisations sociales.
Agro-commerce et conflit armé
8 000 personnes ont été déplacées de la région du Bajo Atrato durant les années 90. À cette époque, les groupes paramilitaires réunis au sein des Autodéfenses unies de la Colombie (AUC) ont férocement attaqué le territoire pour contrôler la zone de transit de la drogue à travers de la rivière Atrato, contrôlé antérieurement par les groupes des guérilleros des FARC et de l’ELN.
Dèes l’année 1993 le congrès colombien reconnaît la propriété communale des terres, ce n’est qu’en 2000 que 48 000 hectares ont été octroyées dans la région du Bajo Atrato à la communauté de Pedeguita-Mancilla, qui avait des droits ancestraux sur la terre. Durant cette même année, des hommes d’affaires et des autorités locales ont encouragé l’expansion des monocultures d’huile de palme sur terres abandonnées ou vendues aux enchères à prix réduit par des communautés afro-colombiennes et des agriculteurs métisses qui ont fui pour sauver leurs vies.
Selon les témoignages d’ex paramilitaires, certains dirigeants des AUC sont en relation avec les producteurs d’huile de palme et des éleveurs auprès de qui ils font la promotion de l’investissement dans le territoire.
Source : Avispa Midia