À Montréal, pour souligner la Journée internationale des femmes autochtones, le 5 septembre a eu lieu le colloque «Résistance des femmes autochtones dans les Amériques». L’évènement a réuni plus de 30 panélistes du monde académique et militant, afin de discuter et de réfléchir quant aux différentes actions et réalisations qu’elles ont accompli à travers leurs luttes.
À partir d’une approche politique, épistémologique et intergénérationnelle, le colloque a dévoilé la richesse des processus de co-construction des connaissances et des savoirs décoloniaux menés par les femmes autochtones du sud et du nord.
Des femmes autochtones de la nation Cris, du soi-disant Canada, ont témoigné du racisme systémique et des conditions précaires dans lesquelles se trouvent la majorité de la population autochtone du pays. Plusieurs communautés ont vécu ou sont menacées des déplacements forcés causés par la construction de grands barrages ou de gazoducs sur leur territoire. Dans le passé, des milliers d’enfants autochtones étaient enlevé.e.s de leurs familles pour être placé.e.s dans les pensionnats sous le contrôle de l’église catholique, sans compter la stérilisation massive forcée dont le gouvernement nie toujours l’existence.
Cette année, une commission d’enquête a rapporté le nombre alarmant des disparitions et d’assassinats des femmes et des filles autochtones au Canada, tout en reconnaissant le génocide vécu par l’ensemble de la population autochtone au pays.
Malgré l’absence d’un véritable processus de justice et de réparation pour les peuples autochtones, la réconciliation est un sujet d’actualité depuis quelques années. En 1982, la Loi Constitutionnelle du Canada réitéra la reconnaissance des droits ancestraux ainsi que ceux issus de traités entre les peuples autochtones et l’État, annonçant une nouvelle ère juridique qui aurait dû mener à la réconciliation.
Cependant, ces discours sont questionnés par des activistes autochtones en Amérique Latine, comme Carmen Cariño, qui affirme qu’il ne peut pas avoir une véritable réconciliation entre les autochtones et l’État si les peuples ne trouvent pas justice et si l’extractivisme canadien continue à produire des impacts sur les territoires ancestraux.
Carmen Cariño nous parle de la lutte des femmes autochtones et des liens tissés entre les peuples du Nord et du Sud :
« La lutte des femmes autochtones va au delà d’une lutte féministe. Elle dépasse les demandes du féminisme et les questionne profondément. La défense des territoires est un enjeu fondamental pour la lutte des femmes autochtones sur tout le continent, parce que le territoire est plus qu’un morceau de terre sur lequel nous naissons. Les liens que créent les femmes avec leurs territoires demeurent très forts, et c’est le cas aussi pour les femmes autochtones du Canada, en dépit des campagnes t d’extermination menées par l’État canadien. Tout ça fait partie d’une histoire marquée par le colonialisme, une histoire qui n’a pas été racontée. Au Mexique et en Amérique centrale, la résistance des communautés du nord est peu connue et je crois qu’il y a beaucoup de points communs. Faire une lecture de cette histoire du Sud au Nord pourrait être fondamentale dans la construction de nouvelles actions en défense des territoires. C’est une des grandes luttes dans lesquelles s’impliquent les femmes sur l’ensemble du continent. Mais il faut souligner que les luttes ne sont pas menées seulement par des mouvements de femmes autochtones, comme nous l’imaginons d’une perspective féministe. Non, les femmes ne se mobilisent pas seules, mais ensemble avec leurs peuples. Et c’est pour cela qu’on ne parle pas d’un mouvement de femmes autochtones, mais plutôt de peuples en mouvement ou tous et toutes participent! »
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Photo : Colloque Résistances des femmes autochtones dans les Amériques