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14 FEVRIER : JOURNEE INTERNATIONALE DES TRAVAILLEUSES DES FLEURS
"Nous sommes plus importantes que des milliers de fleurs réunies"
Montréal, le 5 février 2008 – Afin de souligner la St-Valentin avec un autre regard, le Comité pour les droits humains en Amérique latine (CDHAL) s’allie pour une deuxième année à l’organisme colombien Cactus et aux centaines de milliers de travailleurs de la floriculture oeuvrant dans des conditions de travail difficiles au Sud afin de célébrer la Journée Internationale des travailleuses et travailleurs des fleurs ce 14 février et que cette journée offre une visibilité à ceux et celles qui rendent possible l’exportation de telles beautés.
Des conditions de travail difficiles
Pendant que les exportateurs de fleurs en Colombie ont exporté pour plus d’un milliard de dollars US de fleurs en 2007 et que le marché mondial des fleurs avoisine les 16 milliards, les salaires des employés continuent d’être très bas. Le salaire minimum légal mensuel est de 230USD en Colombie et de moins de 40USD au Kenya, montant insuffisant, dans les deux cas, afin de couvrir les besoins de base d’une famille. Les propriétaires de serres de fleurs se défendent bien de respecter les normes minimales du travail et quelques-uns offrent des certifications écologiques et sociales.
Bien que cela soit souhaitable, plusieurs témoignages recueillis auprès des travailleurs démontrent que le paiement du salaire minimum et des avantages sociaux qu’ils comportent ne sont souvent pas payés en bonne et due forme puisque le secteur favorise la sous-traitance. Ceux-ci, ne disposant pas de contrat, doivent faire de nombreuses heures extras, peuvent être congédiés facilement, ont peine à faire respecter leurs droits et à mettre fin à leurs sérieux problèmes de santé, douleurs au dos, tendinites, problèmes respiratoires, infertilité et malformations congénitales, causés, entre autres, par l’utilisation d’herbicides et de pesticides.
Les journées de travail sont exténuantes, spécialement lors de la période qui précède la St-Valentin, où les journées de travail peuvent durer jusqu’à 20 heures et où les exigences de rendement varient entre 250 et 300 coupes et 1250 à 1500 classification à l’heure. Ces exigences démesurées aggravent les risques reliés à la santé du travailleur.
Devant toutes les difficultés rencontrées par les travailleurs pour faire respecter leurs droits à des conditions de travail décentes et à un milieu de travail sécuritaire pour leur santé et pour l’environnement, UNTRAFLORES, un syndicat national indépendant, a réussi à se former mais peine à se faire reconnaître et respecter. Dans un pays où sont assassinés chaque année une centaine de syndicalistes, ce qui constitue le plus haut taux au monde, créer un syndicat autonome relève de l’exploit et les travailleurs s’associant à Untraflores doivent subir toutes sortes de mesures diffamatoires et discriminatoires (par exemple, le prix du repas à la cafétéria est plus élevé pour les membres du syndicat indépendant que pour les membres du syndicat patronal).
Les droits humains ne sont pas des barrières commerciales à éliminer
Les exportateurs de fleurs, multinationales ou propriétaires indépendants, vantent leurs avantages comparatifs sur le marché: une main-d’oeuvre abondante et bon marché, peu ou pas de conditions de travail minimales à respecter, peu ou pas de règles environnementales, peu ou pas de syndicats indépendants, pas de taxes municipales ou d’impôt national. C’est ce qui permet à tous les petits consommateurs des pays du Nord de s’exclamer de joie lorsqu’ils voient le prix de la douzaine de rose baisser de moitié. Au même moment, l’industrie de la fleur coupée au Canada est en crise.
Selon Le Quotidien de Statistique Canada: "La production de roses a chuté de 22 % en 2005, tandis que la production de fleurs gerbera a accusé une baisse incroyable de 27 %. Le recul de la production de fleurs coupées tient en partie à la concurrence des importations sur le marché des fleurs coupées". La production de fleurs sur le marché global est présente dans les pays suivants: Hollande, Équateur, Mexique, Israël, Kenya, Zimbabwe, Zambie et, plus récemment, au Japon et en Chine. Tous se disputent le marché dans une course à la diminution des coûts de production qui passe nécessairement sur le dos des travailleurs, dont les conditions de travail s’aggravent et les exigences de rendement augmentent.
La Colombie est le deuxième exportateur mondial de fleurs après la Hollande et le premier pourvoyeur des Etats-Unis. Au Canada, selon Statistique Canada un peu moins de 50% des fleurs coupées importées proviennent de la Colombie, principalement les roses et les oeillets. L’exportation de fleurs a aussi ses conséquences environnementales, voyageant quotidiennement par avion, la production massive de fleurs met en danger la nappe phréatique des régions cultivées par son usage excessif d’eau, contamine les sols par l’usage de pesticides toxiques et les rend infertiles en plus de déplacer une agriculture traditionnellement tournée vers l’autosuffisance alimentaire au profit de monocultures de fleurs dédiées à l’exportation.
Cette année, le Comité pour les droits humains en Amérique latine se joint aux travailleurs et travailleuses de la Colombie afin de faire pression, à l’aide d’une pétition en ligne sur notre site, sur le ministère le Protection sociale et les propriétaires de serres de fleurs d’exportation de la Colombie afin qu’ils:
- respectent le droit à la libre association en cessant toutes mesures dissuasives contre l’organisation syndicale autonome et indépendante en Colombie et
- contractualisent directement avec les travailleurs et travailleuse et interdisent la sous-traitance avec les coopératives de placement (Cooperativas de Trabajo Asociado CTA).
Pour ce faire, nous invitons la population et les médias à se joindre à notre délégation, banderoles et fleurs de carton à la main, afin de transmettre toutes les signatures recueillies le jeudi 14 février à 12 h face au Consulat colombien, 1010, rue Sherbrooke Ouest à Montréal.
Pour Margarita Pérez1, travailleuse de serres depuis 20 ans, la lutte pour ses droits continue et elle n’hésite pas à qualifier le travail en serre comme une exploitation. Aux consommateurs et consommatrices du monde, elle leur dit: " … vous achetez la sueur de plusieurs travailleurs. Vous pouvez nous aider à conscientiser, à persuader… Pour que ne soient pas si nombreuses les violations de nos droits comme travailleurs, que les entreprises se responsabilisent et les acheteurs aussi…".
Pour plus de renseignements:
Sarah Charland-Faucher
Responsable de la campagne du 14 février
Comité pour les droits humains en Amérique latine
Auteure du documentaire "À fleur de peau, un bouquet de la Colombie"
ou Marie-Dominik Langlois
Coordonnatrice
514.387.5550
1 Le nom de la travailleuse a été modifié afin de préserver son intégrité.