Dans une perspective inédite au Brésil, les autochtones guaranis de São Paulo ont acquis des actions d’une entreprise de chemin de fer dans le but de dénoncer le manque de mesures environnementales et d’actions visant leur protection par les autres actionnaires. La dénonciation a été faite le 24 avril à Curitiba lors de la réunion annuelle de Rumo Logística, un géant de l’industrie ferroviaire détenant 12 milles km de lignes ferroviaires dans le pays.
La stratégie consistant à acheter des actions afin de provoquer des discussions internes au sein d’entreprises, peu utilisée au Brésil, est connue sous le nom d’« activisme actionnarial ». Pour participer à l’assemblée, les guaranis ont acheté six actions de la compagnie.
Leur cause est soutenue par Relatórios da Funai (Fondation nationale pour les peuples autochtones) et par le Ministère Public Fédéral de São Bernardo do Campo, qui soulignent tous deux le fait que l’entreprise Rumo Logística manque à leur plan basique environnemental, formulé en novembre 2013. En avril, les procureurs du Ministère recommandèrent même à Ibama, l’agence environnementale nationale du Brésil, de suspendre immédiatement la construction d’un nouveau chemin de fer ainsi que la licence d’exploitation de Rumo.
Les guaranis sont particulièrement touchés par ce chemin de fer de marchandises vieux de 90 ans que Rumo continue à développer depuis 2014. En effet, le projet impacte 5 000 guaranis habitant cinq territoires autochtones dans la province de São Paulo.
Suite à cette pression, Rumo avait accepté d’externaliser les travaux de rénovation à un comité local dirigé par les communautés autochtones concernées. Néanmoins, suite à l’élection de Jair Bolsonaro en octobre 2018, dont la plateforme est explicitement anti-autochtone, Rumo annula des réunions prévues avec les communautés et ne se présenta plus à aucune rencontre.
La compagnie affirme qu’elle n’a pas signé d’accords formels, mais les représentants de Rumo ont soutenu que les demandes des autochtones feraient l’objet de discussion à des rencontres internes ce mois-ci.
Sources :
Folha de São Paulo: « Indigenas se tornam acionistas de ferrovia para fazer denuncia contra a empresa »
Global Voices: « Brazilian Indigenous Peoples Buy Shares in Railway Company to Call Out its Failed Environmental Obligations »
Photo : Pedro Biava / Brasil de Fato