La défenseure des droits humains maya K’iche Lucía Ixchiu était au Canada quand, le 7 septembre, l’état de siège fut instauré dans 22 municipalités du Guatemala. Pour Lucía, le gouvernement de Jimmy Morales démontre encore une fois une politique anti-souveraine qui encourage les investissements étrangers intéressés à poursuivre leurs projets extractifs, sans avoir l’opposition des communautés locales.
Lucia Ixchiu est venue au Canada pour participer au colloque sur la résistance des femmes autochtones dans les Amériques. Elle a aussi reçu le prix de la Défenseure de l’année, octroyé par l’organisation canadienne Projet Accompagnement Québec-Guatemala. Ce prix souligne son parcours comme leader social et comme communicatrice populaire autochtone, ainsi que le travail qu’elle réalise avec le collectif artistique et culturel Festivales Solidarios.
Cependant, face aux évènements qui se produisent au Guatemala, le séjour de Lucia au Canada s’est vu comme une chance de visibiliser les dessous de ce grave contexte de violations des droits humains au pays.
« J’aimerais partager un peu d’informations sur ce que nous vivons avec l’état de siège au Guatemala. Le gouvernement a déclenché la militarisation justement dans les régions où se trouvent des mouvements qui luttent pour les territoires. Nous parlons des municipalités de l’Estor, de Zacapa et d’autres endroits où il y a en ce moment des luttes pour la défense de l’eau et de la terre. Des régions ou différents projets miniers et hydroélectriques tentent de s’implanter. »
« Nous voyons une menace a notre droit à l’autodétermination en tant que peuple. Cette imposition de l’état de siège fait la promotion de la militarisation et violent les droits humains les plus élémentaires, a grande échelle»
« C’est pour cela que nous diffusons et dénonçons ce qui se passe au Guatemala, pour demander la solidarité de la communauté internationale, demander des actions urgentes, demander des communiqués et des actions de soutien.”
Le 11 septembre, s’est tenue une manifestation devant le consulat du Guatemala à Montréal. Différentes organisations canadiennes ont aussi signé et diffusé une lettre en réponse à l’état de siège qui exige la fin de la militarisation et de la criminalisation des peuples autochtones ainsi que les personnes défenseures des droits humains au Guatemala.
En tant que communicatrice populaire, Lucía met en lumière les tentatives de faire taire les voix dissonantes des médias traditionnels.
« Depuis l’instauration de l‘état de siège, nous avons assisté à quatre jours de militarisation. Il y a des personnes qui sont détenues, il y a des abus, de la persécution et la radio communautaire du peuple maya Q’eqchi est criminalisée. Cette tente de briser la censure médiatique pour partager les points de vue des peuples autochtones.»
Il convient également de souligner que Lucia Ixchiu est survivante d’un massacre qui s’est produit en 2012 dans sa communauté. Faisant suite à son expérience, elle utilise l’art et les manifestations publiques pour récupérer la mémoire collective des peuples mayas et de leurs luttes au Guatemala depuis l’époque coloniale, passant par les années de conflit armé jusqu’à aujourd’hui, sous l’influence néfaste des pays du nord.
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Photo: ALER