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Mesdames, Messieurs,
C’est avec une consternation vive et aigüe que nous, les organisations de la société civile, avons appris la nomination à l’hiver 2009 de Francisco Barrio Terrazas comme ambassadeur du Mexique au Canada.
Nous appuyons les critiques de l’organisation d’accompagnement des familles des victimes assassinées à Ciudad Juarez, «Nuestras hijas de regreso a casa», à l’effet qu’il est extrêmement honteux au point de vue moral et éthique de nommer un tel individu comme représentant de son pays.
Francisco Barrio Terrazas a été le gouverneur de Chihuahua, l’état le plus grand de la République mexicaine, de 1992 à 1998. Cette époque est celle où Ciudad Juarez a été mondialement connue comme le lieu où des jeunes femmes sont assassinées de façon cruelle et brutale, sans que des enquêtes concluantes ne soient menées, et dont les crimes continuent d’être perpétrés et restent impunis à date. Ce personnage est connu pour avoir accusé ces jeunes femmes d’être responsables de leur propre tragédie en expliquant qu’elles s’habillaient de manière provocante et se déplaçaient seules dans la rue. Il affirme que, pendant son mandat,« seulement » 80 femmes ont été assassinées.
Nous sommes de plus choqués de savoir que vous avez nommé Arturo Chavez Chavez procureur général de la République. Son expérience en tant que procureur de l’état du Chihuahua n’a que démontré son manque de considération face aux cas non résolus de femmes assassinées. Ce manque d’attention a d’ailleurs été décrit par certaines organisations mexicaines comme une intention à faire obstacle aux enquêtes sur ces crimes.
De plus, nous désirons vous faire part de nos craintes face à la croissante militarisation dans des régions où les violences sont déjà très fortes, tel que l’état de Chihuahua. Nous craignons que la prolifération d’armes engendre une importante augmentation des violations de droits humains, notamment des droits des femmes. En effet, un lien direct est fait entre la militarisation et l’augmentation des violences faites aux femmes, leur traite et la hausse de la prostitution. Nous déplorons à ce sujet que le troisième rapport du gouvernement sur les féminicides ne fasse pas état des 106 féminicides commis dans l’état de Chihuahua.
Considérant que le Mexique a été élu à la présidence du Conseil des droits de l’Homme des Nations unies,
Considérant que le Canada et le Mexique sont liés à travers des ententes commerciales tels que l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) et le Partenariat pour la prospérité et la sécurité (PSP),
Considérant que les choix politiques du gouvernement Calderón reflètent une profonde digression des valeurs canadiennes progressives et sociales et s’inscrivant dans une longue tradition de droits humains,
Nous, Canadiens et Canadiennes, joignons nos voix à celles de nos homologues et voisins du Sud en vous demandant le retrait de ces deux personnalités politiques.
Nous exhortons le gouvernement mexicain à prendre les mesures nécessaires afin de garantir la sécurité aux femmes mexicaines et résoudre les meurtres et disparitions de femmes tant à Ciudad Juarez, dans l’état du Chihuahua, que dans tous les états où sévissent des féminicides, en particulier dans les états de Guerrero, de Oaxaca, de Veracruz et dans l’état de Mexico.
Ces mesures incluent d’abord et avant tout le respect des droits stipulés dans la Déclaration universelle de l’Organisation des Nations unies des droits de l’Homme, en particulier le droit à la sécurité. Il est de plus urgent que le gouvernement mexicain harmonise sa législation, éradique toute violence à l’encontre des femmes et réforme le système judiciaire du pays.
Il est aussi du devoir et de la responsabilité du gouvernement mexicain de protéger ses citoyens et citoyennes, en assurant d’abord l’accès à la justice pour les victimes et leurs familles, de même qu’à des services de soutien. De plus, il doit assurer la protection des travailleurs communautaires et d’organismes de défense de droits qui accompagnent les familles des victimes, mettant ainsi en péril leur propre intégrité.
Nous vous remercions d’accorder à cette correspondance la plus haute importance.
20 signatures recueillies