7 mai 2021
Washington, DC – La Commission interaméricaine des droits humains (CIDH) condamne l’opération policière qui a entraîné la mort d’au moins 28 personnes dans la Favela de Jacarezinho, à Rio de Janeiro, et exprime son extrême préoccupation face à la persistance de la violence institutionnelle au Brésil. Dans ce contexte, elle exhorte l’État à enquêter rapidement et avec diligence sur les faits, à punir les responsables et à accorder des réparations aux victimes et à leurs familles.
La CIDH a reçu des informations sur une opération policière contre le crime organisé menée par la police civile provinciale, le 6 mai, dans la favela de Jacarezinho, dans la ville de Rio de Janeiro, au cours de laquelle au moins 28 personnes ont perdu la vie, certaines présentant des caractéristiques qui pourraient indiquer une exécution extrajudiciaire. Selon les informations reçues, au cours de l’opération, les forces de sécurité ont fait un usage excessif de la force contre les habitant.e.s de la favela, leurs maisons ont été fouillées sans mandat, et les commerces et les transports ont été perturbés. Parmi les morts, il y avait un policier. La Commission note que, selon une source publique, il s’agirait de l’action policière la plus meurtrière de l’histoire de Rio de Janeiro.
La Commission souligne également que l’opération a été réalisée au mépris de l’arrêt du Tribunal Suprême Fédéral (STF), émanant de la décision de l’Action pour Non Respect du Principe Fondamental (ADPF) n° 635, du 5 juin 2020, qui ordonne qu’aucune opération policière ne soit réalisée dans les communautés de Rio de Janeiro pendant la pandémie de COVID-19. Selon la décision du STF, l’opération ne pouvait être effectuée que dans des cas absolument exceptionnels et avec une notification préalable au ministère public, qui, selon un rapport de la police elle-même, n’aurait été communiquée que trois heures après le début de l’action.
En ce qui concerne la violence policière, dans le rapport sur la situation des droits humains au Brésil, la CIDH a noté que, en réponse à un contexte de discrimination raciale systémique, les forces de sécurité de l’État mènent des opérations axées sur les communautés exposées à la vulnérabilité socio-économique et présentant une forte concentration de personnes d’ascendance africaine, sans respecter les normes internationales en matière de droits humains.
Dans ce contexte, la Commission rappelle à l’État son devoir de réformer les forces de sécurité publique afin qu’elles se conforment aux normes internationales sur l’usage de la force, fondées sur les principes de légalité, de proportionnalité et d’absolue nécessité. Elle réitère également l’urgence de modifier la logique de militarisation des institutions policières, dont la nature est contraire aux normes internationales en matière de droits humains; et réaffirme que les institutions de ce type laissent de côté l’approche des droits humains, élément fondamental pour aborder les problèmes liés à la sécurité des citoyen.ne.s dans les États démocratiques.
Enfin, la Commission interaméricaine demande à l’État d’ouvrir immédiatement des enquêtes sur ces crimes de manière rapide, impartiale et exhaustive, conformément aux normes interaméricaines, et d’accorder des réparations aux victimes de violations des droits humains et à leurs familles.
La CIDH est un organe principal et autonome de l’Organisation des États américains (OEA), dont le mandat découle de la Charte de l’OEA et de la Convention américaine relative aux droits humains. La Commission interaméricaine a pour mandat de promouvoir le respect des droits humains dans la région et d’agir en tant qu’organe consultatif de l’OEA dans ce domaine. La CIDH est composée de sept membres indépendants qui sont élus par l’Assemblée générale de l’OEA à titre personnel et ne représentent pas leur pays d’origine ou de résidence.
Source: Commission interaméricaine des droits humains (CIDH)
Source photo: ONU Derechos Humanos – América del Sur