Le Lonko Juan Pichún, de la communauté mapuche de Temelemu au Chili, était de passage à Montréal en octobre dans le cadre du panel sur les “Droits territoriaux et des peuples autochtones”. Il a exposé le jugement de la Cour interaméricaine des Droits Humains (CIDH) qui a condamné l’État chilien pour son application de la loi antiterroriste dans le cas des Lonkos en 2003. Un groupe de communaux Mapuche avait été accusé de délits terroristes et d’incendies présumées. De plus, c’est ce jugement qui a condamné le père de Juan Pichun à cinq ans de prison.. C’est Juan Pichun qui fut l’un des dépositaires dans le cas porté devant la CIDH en 2011. Ce dossier dénonçait le caractère arbitraire de l’application de la loi antiterroriste par l’État en plus de la série d’irrégularités, notamment sur l’utilisation de témoignages protégés, qui sont survenues durant le procès et qui ont mené à sa condamnation.
La loi antiterroriste fut instauré lors de la dictature d’Auguste Pinochet. Depuis, elle a continué d’être utilisée de manière systématique pour criminaliser la lutte du peuple Mapuche. Cela a fait l’objet de nombreuses critiques, notamment sur son application comme base de la persécution et des violations des droits humains contre les leaders et les communautés mapuches. En 2014, la CIDH a annoncé son jugement, comme précédent historique, en condamnant l’État chilien pour l’application injuste, sélective et raciste de la loi antiterroriste. Ainsi, cela démontre la violation des principes de légalité, de présomption d’innocence, d’égalité et de non discrimination. Cependant, jusqu’à aujourd’hui, l’État chilien n’a pas encore accomplis l’intégralité des moyens de réparations et continue d’utiliser cette loi pour criminaliser la résistance et la lutte de défense du territoire du peuple mapuche. Nous avons eu l’opportunité de nous entretenir avec Juan Pichun sur la situation actuelle:
“Malgré les recommandations qu’a fait la Cour Interaméricaine d’amener des changements à la Loi antiterroriste, nous croyons que la situation au Chili n’a pas changé. jusqu’à maintenant, les recommandations n’ont pas eu d’impacts et l’application de cette Loi antiterroriste persiste, tout comme les assassinats, les raids, la violence contre les femmes et celle contre les enfants. Encore aujourd’hui, des personnes disparaissent de notre communauté, sans que nous sachions où elles se trouvent. Nous sommes dans une situation compliquée qui doit être partagée pour interpeller les systèmes interaméricains. De nos jours, ces institutions résolvent les cas selon une forme particulière, qui implique des instruments internationaux qui ne considèrent pas les droits collectifs des peuples, et c’est pour cela que nous appelons toutes personnes ayant une influence sur ces organisations, de l’exercer”.
Photo : El desconcierto