Vincent Larin, 6 novembre 2022
Plus d’une centaine de personnes ont manifesté dimanche après-midi à Montréal pour réclamer la mise en place d’un programme « inclusif » de régularisation pour les sans-papiers au pays.
Le mois dernier, le ministre fédéral de l’Immigration, Sean Fraser, a annoncé qu’il planchait sur la présentation d’un programme massif de régularisation des travailleurs migrants sans statut.
Dimanche, beaucoup ont insisté sur l’importance de rendre ce programme « inclusif » et qu’il évite certains écueils rencontrés par des versions précédentes, parmi lesquelles le programme de régularisation des « anges gardiens » de Québec.
Celui-ci, censé offrir un statut permanent aux travailleurs sans-papiers qui ont œuvré en CHSLD durant la pandémie de COVID-19, excluait certains corps d’emploi, a rappelé le député du Nouveau Parti démocratique Alexandre Boulerice, en entrevue en marge de la manifestation.
« Il fallait vraiment donner des services aux gens. Les gens qui travaillaient dans les cuisines, les gardiens de sécurité, ceux qui faisaient le ménage n’étaient pas inclus », a-t-il expliqué.
Plus d’ouverture réclamée
Le Canada serait devenu « comme accro » aux programmes de travailleurs immigrants temporaires, par exemple dans le domaine de l’agriculture, remarque Alexandre Boulerice. Or, « si ces gens sont assez bons pour travailler, faire en sorte que nos industries fonctionnent, ils doivent avoir un chemin vers la résidence permanente », dit-il.
Le président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), Luc Vachon, a appelé pour sa part à l’instauration d’un programme « plus rapide et avec plus d’ouverture ». « Qu’on reconnaisse déjà que ceux qui sont ici depuis longtemps, qu’il serait le temps de les considérer comme des résidents du Canada à part entière », a-t-il indiqué.
Présent à la manifestation comme porte-parole du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants, Mamadou Konaté a lui-même expérimenté les limites de ce programme même s’il avait travaillé comme préposé à l’entretien ménager en zone rouge dans trois CHSLD, dont l’un où il a contracté la COVID-19.
Rappelons qu’en septembre 2020, M. Konaté s’était rendu de manière volontaire à l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) afin de régulariser son statut. Sa demande d’asile avait alors été rejetée, puis il avait été arrêté sur place.
« Quand tu n’as pas de statut, tous tes droits sont bafoués. Tu travailles, tu fais toutes les tâches comme tous les autres, mais tu ne bénéficies d’aucun service public », a-t-il résumé.
Des demandes à Québec
La trentaine d’organismes communautaires représentés dimanche à la manifestation ont adressé leurs demandes à Ottawa, mais aussi à Québec, plus particulièrement à la nouvelle ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, Christine Fréchette, comme il s’agit d’une compétence partagée.
Le nombre de personnes avec un statut irrégulier reste flou au pays, comme il s’agit par définition d’une population cachée. Le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration du Parlement estime toutefois leur nombre « entre 20 000 et 500 000 personnes ».
Au Québec, ce nombre pourrait s’élever jusqu’à 100 000, quoiqu’il s’agisse d’une estimation uniquement basée sur les observations des avocats en droit de l’immigration, indique le président sortant de leur association, Guillaume Cliche-Rivard.
À noter, d’autres rassemblements semblables avaient également lieu au même moment dans d’autres villes du Québec, dont dans la Capitale-Nationale et à Saguenay.