Communiqué à l’opinion publique
CENSAT Agua Viva – Amis de la Terre Colombie
6 octobre 2016
Suite aux résultats du plébiscite du 2 octobre dans lequel s’est manifesté le refus d’une partie de la population de ratifier les accords entre la guérilla des FARC et l’État colombien, dirigé par le président de la République Juan Manuel Santos, nous nous permettons d’exprimer à la communauté nationale et internationale ce qui suit :
Notre appel aux parties pour qu’en aucune circonstance ne prenne fin le cessez-le-feu bilatéral convenu entre les FARC et l’État colombien, alors que le déclenchement d’une confrontation armée entraînerait le retour à la cruelle réalité de la guerre, qui a causé la mort d’environ 300 000 hommes et femmes dans le conflit dont a souffert notre pays.
Nous comprenons que le rejet par une marge minimale de la signature des accords, par référendum, est avant tout un appel à la paix et à sa construction à partir de différents points de vue – en aucun cas une apologie de la violence ou de la poursuite de la guerre – et un appel à la participation réelle de la société dans la résolution du conflit armé.
En ce sens,
• Nous invitons les différents secteurs de la société colombienne engagés pour la vie à s’impliquer dans le processus de consolidation de la paix à partir des exigences et des revendications des peuples, que leurs processus, leurs organisations et mouvements représentent. Aujourd’hui plus que jamais, la consolidation de la paix doit s’exprimer à travers la mobilisation sociale de toutes les forces qui composent le pays, pour la dignité de son quotidien et de ses rêves. Il n’est pas possible de succomber aux tentatives de manipulation d’opportunistes politiques qui, pour favoriser leurs intérêts personnels et ceux de la classe dominante, désinforment et manipulent l’opinion publique, et présentent comme des représentants de la société dans son ensemble, attisant la guerre et de la violence politique en Colombie. Les mobilisations de masse pour la paix qui ont eu lieu le 5 octobre dans plus de 14 villes sont une démonstration claire de soutien à la défense de la vie et du rejet de l’opportunisme qui prône les violences.
• Nous exigeons l’inclusion et la participation effectives et obligatoires des peuples –des communautés, des organisations, des processus et des mouvements sociaux- dans la continuité des négociations avec la guérilla des FARC et celles qui devraient se poursuivre prochainement, dans leur phase publique, avec l’Armée de libération nationale-ELN. Ce sont les peuples qui ont vécu les atrocités de la guerre et qui ont construit au jour le jour des alternatives pour la paix et les appels à la proposition de solutions concrètes à l’impasse à laquelle fait face le pays, notamment dans des espaces comme la Table sociale pour la paix-MSP et la Table sociale minéro-énergétique et environnementale-MSMEA, entre autres.
• Nous nous opposons à toute possibilité d’un pacte entre des élites qui ramènerait la Colombie à des scénarios tels que celui du Front National, qui a avivé l’esprit de guerre et entraîné le monde rural et certaines zones urbaines dans l’une des violences les plus sanglantes de la mémoire vivante. Une violence historique parrainée par les mêmes élites et factions qui voulaient perpétuer le conflit armé et qui aujourd’hui refusent de laisser progresser le processus de paix.
• Nous réaffirmons notre volonté et notre engagement total pour la recherche de la vérité et sa construction, qui pourrait partiellement émerger avec les commissions d’éthique et de la vérité définies dans le processus actuel, cette vérité tant crainte, que l’on tente de la cacher en utilisant des stratégies de peur et d’intimidation, employées avec la population par des secteurs liés à la guerre pour les bénéfices qu’elles leur fournissent. Nous soulignons notre engagement pour la construction de la mémoire historique et la vérité environnementale comme une condition nécessaire à la réconciliation en tant qu’êtres humains, et avec nos territoires. Ce processus de construction devrait avoir comme premiers protagonistes les peuples affectés par la violence, qui se sont vus dépouillés de leurs moyens de subsistance, mais pas de leur dignité pour continuer à défendre la vie.
• Nous demandons à la communauté internationale son soutien permanent pour garantir que le pays chemine vers la construction d’une paix territoriale, avec justice sociale et environnementale, et pour que le silence des fusils permettent d’instaurer la dissension politique et le dialogue comme bases pour semer une Colombie juste, solidaire et durable. Nous vous exhortons à accompagner les mouvements sociaux afin qu’ils aient des garanties pour développer librement leurs actions et projets pour la défense de la vie et des territoires.