Un nouveau rapport élaboré par la Coalition contre la pandémie minière en Amérique latine met en évidence l’avancée effrénée de l’exploitation minière pendant la pandémie, raison pour laquelle les communautés et les peuples d’Amérique latine ne pouvaient pas baisser la garde, même en prenant des mesures pour se protéger du COVID-19.
Le rapport, intitulé « No Reprieve : Pour la vie et le territoire, COVID-19 et la résistance à la pandémie minière », est basé sur des études de cas de neuf pays d’Amérique latine : Mexique, Honduras, Panama, Colombie, Équateur, Pérou, Brésil, Chili et Argentine. Il examine comment les gouvernements et les sociétés minières ont profité de la longue pandémie de COVID-19 pour positionner une expansion minière agressive comme « essentielle » à la relance économique et à la transition énergétique. Dans le même temps, il documente les réponses et la résilience des populations touchées dans des conditions encore plus défavorables qu’avant la pandémie, soulignant que l’attention mutuelle, l’organisation communautaire, la terre, l’eau et une alimentation saine sont ce qui est vraiment essentiel.
La recherche souligne que le secteur minier, en particulier l’exploitation des métaux, a connu un boom économique, alors que les communautés et les peuples subissent toujours les conséquences de multiples crises interdépendantes : par rapport à la situation socio-économiques, sanitaire, environnementale et par rapport à la violence. Les prix élevés des minéraux, les menaces d’interruption des chaînes d’approvisionnement en matières premières, la transition énergétique, en plus des politiques extractivistes et de la logique colonialiste de l’étranger qui cherche à tirer parti de toute circonstance possible pour favoriser les intérêts étrangers, ont servi d’impulsion à une plus grande spéculation et à l’expansion du secteur au cours de cette période. Ensemble, ces processus ont renforcé la répression, la violence et le contrôle social des gouvernements et des entreprises sur les populations.
Malgré les nombreuses menaces, le rapport se conclut par un examen de l’importante résistance au modèle minier qui a persisté malgré le contexte de violence et de catastrophe climatique et écologique. Pour les communautés et les personnes en première ligne contre l’exploitation minière, les expériences vécues au cours de ces deux dernières années ont renforcé l’importance de continuer à défendre le territoire, l’eau et l’air purs, et les moyens de subsistance. En bref, il n’est pas possible de « rester à la maison » lorsque tout est en danger.
La Coalition contre la pandémie minière est un groupe d’organisations, de réseaux et d’initiatives de justice environnementale d’Amérique du Nord, d’Europe, d’Asie-Pacifique, d’Afrique et d’Amérique latine qui travaillent en solidarité mondiale avec les communautés, les peuples autochtones et les travailleurs et travailleuses pour répondre aux abus miniers liés à la pandémie de COVID-19. Ce rapport s’inscrit dans le cadre d’une collaboration de recherche mondiale, qui comprend des études de cas élaborées en partenariat avec des communautés et des groupes de base dans 23 pays. Au début du mois de juin, la Coalition publiera des rapports basés sur des analyses parallèles en Asie, en Afrique, en Europe et en Amérique du Nord.
Citations des études de cas
Communauté d’Aurizona, au Brésil : « La pandémie a servi à intensifier les conflits et la violence causés par les entreprises dans nos territoires; [il y a eu] de nombreux cas de menaces, de renforcement des milices […] Avec un gouvernement génocidaire comme celui que nous avons ici, les entreprises minières se sentent sans doute très autorisées à agir avec violence. » Dalila Alves Calisto est membre du Mouvement des personnes affectées par les barrages (MAB) dans l’État de Maranhão et fait partie de la Coordination nationale du MAB.
- Dalila est l’une des cinq dirigeant.e.s locales persécuté.e.s légalement par la compagnie minière canadienne Equinox Gold dans le cadre de ses tentatives de pacifier les protestations après le débordement d’un barrage de résidus à la mine d’or Aurizona en 2021, contaminant l’eau d’une communauté de 4 000 personnes en aval. La communauté ne dispose toujours pas d’un approvisionnement en eau adéquat.
Municipalité de Putaendo, au Chili : « […] l’une des choses sur lesquelles nous avons beaucoup travaillé est d’amener les gens à comprendre et à apprendre à valoriser ce que nous avons, ce que nous avons en tant que territoire, et à quel point il est important de défendre l’écosystème. Lorsque les gens commencent à valoriser cela, des engagements et des actions concrètes de résistance et d’organisation sont générés. » Alejandro Valdés, représentant de l’organisation Putaendo Resiste, dont la communauté est menacée par la compagnie minière canadienne Los Andes Copper.
- Putaendo est la première municipalité chilienne à se déclarer « territoire libre d’exploitation minière ». Pendant toute la durée de la pandémie, Los Andes Copper a tenté de forcer son projet de mine de cuivre à deux fosses à se lancer dans des travaux d’exploration avancés, pour lesquels un permis controversé lui a été accordé alors que la population était en état d’urgence. Pendant des années, la société a mené un programme de forage sans les permis environnementaux appropriés et dans un contexte d’opposition généralisée.
Lutte de six États, au Mexique : « Après que l’activité minière ait été déclarée essentielle et nécessaire pour réactiver l’économie, il n’y a pas eu de sursis. Personne n’a remis en question les paradigmes du libre-échange au service des marchés internationaux et des intérêts privés, de la surexploitation de nos corps et des biens communs, ou de la consommation au-delà des limites de la planète. Pas un doigt n’a non plus été levé pour briser l’impunité dont jouissent les entreprises et les gouvernements afin de demander des comptes à ceux qui ont causé tant de dommages à l’eau, à la terre, à la santé et à la vie dans les territoires affectés par les mines ou autres mégaprojets. » Réseau mexicain des personnes affectées par l’exploitation minière (REMA)
- Le Mexique était l’un des rares pays à ne pas faire de l’exploitation minière une activité essentielle dès le départ. L’industrie s’est appuyée sur l’ambassade des États-Unis et a fait appel à l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange nouvellement renégocié entre le Mexique, les États-Unis et le Canada pour faire changer les choses en l’espace de six semaines. Par conséquent, même au plus fort de la pandémie, les communautés ont trouvé le moyen de poursuivre la lutte contre les nouvelles autorisations et les dommages sanitaires liés à l’exploitation minière, alors que la militarisation et l’extrême violence s’aggravaient.
Autres cas (disponibles dans la version complète de ce rapport) : Province de Chubut, Argentine ; La Guajira, Colombie ; Peuple autochtone Shuar de la province de Morona Santiago, Équateur ; Municipalité de Tocoa, Honduras ; Mouvement national, Panama ; Espinar, Pérou ; Puno, Pérou.
Rapport complet et photo: MiningWatch Canada