(Ottawa) Le 22 avril, vers 20h30, dans la nuit de vendredi, la coordonnatrice pour l’Amérique Latine de MiningWatch Canada, Jen Moore, et le journaliste américain John Dougherty furent arbitrairement détenus à Cusco, au Pérou, après avoir diffusé publiquement un documentaire traitant les opérations minières de la compagnie Hudbay au Canada, aux États-Unis, au Guatemala ainsi qu’au Pérou. Ils ont été arrêtés par 15 à 20 policiers, dont plusieurs étaient en civil, de la garde nationale et des services de l’immigration. Durant leur détention, Moore et Dougherty furent questionné sur leur statut d’immigration et informé que leurs activités, c’est –à-dire diffusé un documentaire et engager une discussion avec la population péruvienne, n’étaient pas permis en vertu des règlements du visa de touriste au Pérou. Ils ont été relâchés deux heures plus tard sous la menace de devoir comparaître en Cour le jour même.
Selon Moore, « L’incident de vendredi ne concerne pas notre statut migratoire mais bien une tentative de Hudbay d’exercer un contrôle sur l’information diffusé aux communautés vivant autour de leur mine, Constancia. Pourquoi la compagnie Hudbay a-t-elle si peur que les communautés vivant près du site en sachent davantage sur ses opérations globales? ».
Il est également important de soulever que la stigmatisation et la criminalisation de Moore et Dougherty qui ont présentés le documentaire « Flin Flon Film Flam » dans les communautés péruviennes près du site de Constancia, à Cusco et à Lima a commencée bien avant leur arrivée au Pérou le 15 avril. En effet, un article anonyme publié dans un journal de Cusco accusait Jen Moore ainsi que plusieurs organisations péruviennes coordonnant la présentation de film avec des organisations locales d’être en train de tendre une embuscade à Hudbay et de salir son image.
Cependant, « l’embuscade » était davantage dirigée contre ceux qui ont présentés le film que contre la compagnie.
Du 17 au 20 avril, lorsque le film était présenté dans des évènements publics dans la province de Chumbivilcas où Hudbay possède son plus grand site minier, Dougherty, MiningWacth Canada ainsi que des représentant.es de l’ONG péruvienne Derechos Humanos sin Fronteras y CooperAcción étaient constamment filmés par plusieurs individus et traqués par la police. De plus, plusieurs leaders des communautés ont rapportés avoir été questionnés par la police et par des représentant.es de la compagnie à propos des projections du documentaire.
Ces évènements publics étaient organisés pour permettre à Dougherty de diffuser le film qu’il a produit et le documentaire comporte plusieurs entrevues avec des membres de ces mêmes communautés en novembre 2014, lorsqu’ils se sont mobilisés pour protester contre les actions de Hudbay et qu’ils ont été victimes d’une violente répression de la part de la police. Par ailleurs, Dougherty a traduit le film en espagnol et en quechua afin de pouvoir en donner des copies aux communautés.
La détention arbitraire longue de quatre heures de Moore et Dougherty dans la nuit du vendredi faisait suite à la diffusion du documentaire au centre municipal de la culture à Cusco. Durant leur interrogatoire, il leur fut demandé de faire une déclaration sur leurs activités au Pérou mais, en raison, du caractère illégal de leur détention et par crainte que la compagnie et la police cherchent à déposer des charges criminelles pour « incitation à la violence », ils ont décidés de garder le silence.
Samedi dernier, le Ministère de l’Intérieur péruvien a fait une annonce officielle réitérant le soutien du gouvernement envers les opérations de la compagnie Hudbay et condamnant les actions de Moore et Dougherty qu’il considère comme une menace pour l’ordre public et la sécurité nationale. Par ailleurs, le Ministère de l’Intérieur, par l’entremise de cette annonce, a tenté de faire un lien entre Moore, Dougherty et deux manifestations de 2016 contre les actions de Hudbay, aux revendications sociales et environnementales.
« Je suis profondément troublé par le niveau apparent de coordination entre Hudbay, la police et le gouvernement péruvien qui tentent d’empêcher les communautés locales d’avoir accès à de l’information indépendante » raconte Moore.
Elle ajoute : « Nous savons que Hudbay possède d’importants contrats avec la police nationale au Pérou afin d’assurer la sécurité dans ses zones d’influences à Cusco. Il est donc fort probable que la police ait agi sous les ordres de la compagnie et non au nom de la sécurité publique ».
Elle affirme également que « le gouvernement canadien devrait intervenir auprès du Ministère de l’Intérieur au Pérou ainsi qu’auprès de Hudbay pour savoir pourquoi des citoyen.n.es canadien.n.es et américain.es ainsi que des membres du regroupement péruvien pour les droits humains et environnementaux et des leaders de communautés sont soumis.es à cette surveillances, à ce harcèlement et à cette criminalisation ».
Dougherty et Moore sont convoqués devant les autorités de l’immigration lundi matin. Ils devront affronter ces procédures administratives avec leur équipe légale péruvienne. Sur conseil de leurs avocat.es et craignant une seconde arrestation, ils ont quittés le Pérou samedi dernier.
Documentaire disponible sur YouTube:
Source: MiningWatch Canada